Des analystes estiment que l'Algérie maintient ses positions de principe constantes concernant la résolution des conflits dans les pays voisins, en particulier en Libye, au Mali et au Niger. C’est ce qu’ont confirmé les récentes déclarations du président de la République, Abdelmadjid Tebboune, lors de sa rencontre périodique avec les représentants des médias nationaux.
Le chercheur en affaires stratégiques, Rachid Allouche, a déclaré que le point le plus important souligné par le président Tebboune à propos des crises que traversent plusieurs pays voisins est que l’Algérie s’appuie sur des principes solides guidant son action diplomatique, acquis depuis la guerre de libération nationale, dont le plus important est la non-ingérence dans les affaires intérieures des États.
« Cela n’exclut pas le fait que l’Algérie adapte ses positions en fonction de la nécessité de préserver sa sécurité nationale et de maintenir la paix et la sécurité dans la région», a toutefois précisé Rachid Allouche dans une déclaration à El-Khabar.
Dans cette optique, le président de la République a réaffirmé la politique de bon voisinage comme doctrine inébranlable dans les relations avec les pays voisins, et son rejet absolu de toute ingérence dans leurs affaires internes, tout en affirmant la disponibilité constante de l’Algérie à contribuer à la résolution de la crise malienne à travers le dialogue, le consensus et la réconciliation entre toutes les forces maliennes, à condition que le processus soit entièrement entre les mains des Maliens eux-mêmes, a-t-il ajouté.
Il a également insisté sur la nécessité pour les forces non constitutionnelles au Mali de comprendre qu’elles ont commis une erreur stratégique fatale, répétée depuis 1960, en croyant que la solution dans le nord du Mali pourrait être militaire, alors que l’expérience historique a démontré le contraire.
Partant de cette lecture, le président Tebboune — selon le Dr Allouche — a affirmé que l’Algérie reste prête à aider les frères maliens, sans jamais les abandonner, à condition que cette aide soit acceptée par eux, mais aussi sans aucune influence préalable de puissances étrangères actives dans la région, qui ont hypothéqué la souveraineté du peuple malien en consolidant le statu quo. Cela inclut également la problématique des mercenaires dans la région, qui a complexifié davantage la situation sécuritaire, aussi bien en Libye qu’au Mali. C’est une réalité que l’Algérie rejette catégoriquement, et cette position a été clairement exprimée aux puissances intervenant dans la région, selon les propos du président.
Dr Allouche a affirmé que, sur la base de ces positions fondées sur une analyse réaliste de la nature des crises au Mali, en Libye ou au Niger, la vision algérienne, qui repose sur la nécessité de solutions pacifiques via le dialogue, ainsi que le traitement des injustices historiques subies par certaines communautés locales à travers des projets de développement, demeure l’une des clés essentielles pour protéger les ressources et la souveraineté des pays de la région.
De son côté, le professeur en sciences politiques et relations internationales, Mabrouk Kahy, a indiqué que la déclaration du président Tebboune concernant la crise libyenne intervient dans le contexte des récents développements en Libye, marqués par une grave insécurité à Tripoli, qui a heureusement été maîtrisée par la suite. Il a considéré cette déclaration comme un avertissement contre une possible explosion incontrôlable de la situation à l’avenir.
Mabrouk Kahy n’a pas manqué de précisé au journal El Khabar que la position de l’Algérie est constante : « L’Algérie ne s’ingère pas dans les affaires intérieures des Libyens, n’a aucune ambition territoriale ou politique en Libye, et elle encourage tous les partis libyens au dialogue, en vue d’aboutir à une base électorale commune, à l’organisation d’élections et à la formation d’institutions étatiques ».
Concernant la déclaration antérieure du président Tebboune selon laquelle "Tripoli est une ligne rouge", Kahy a expliqué que le chef de l’État a clairement signifié que l’Algérie ne permettra pas que Tripoli tombe entre les mains des terroristes, et ne tolérera pas qu’elle devienne un sanctuaire pour Daech ou les mercenaires, tout en réaffirmant que "la Libye appartient aux Libyens, et qu’i leur revenait à eux seuls de décider du destin de leur pays"
Il a souligné que l’insistance de l’Algérie à "se tenir sur une seule ligne" est une indication claire de sa neutralité : elle ne prend parti pour aucun camp, encourage le dialogue, et rejette les forces étrangères instrumentalisées qui cherchent à prolonger la crise et maintenir le chaos.
Le professeur Kahy a ajouté que les propos du président Tebboune ont été bien accueillis par les Libyens, qui y ont vu une confirmation que l’Algérie ne les abandonnera pas et les soutiendra sans influencer leurs décisions souveraines. Il a également souligné que la stabilité de la Libye signifie aussi la stabilité de l’Algérie, surtout au regard des liens géographiques et sécuritaires directs, notamment dans les zones frontalières. Ainsi, plus les Libyens sortiront rapidement de leur crise, plus cela favorisera le retour de la sécurité dans le Sahel africain et facilitera le contrôle de l’immigration clandestine.
Concernant la crise au Mali, le professeur Kahy estime que les propos du président Tebboune reflètent sagesse et rationalité, et confirment que l’Algérie ne nourrit aucune hostilité envers un pays frère et voisin. L’Algérie a aidé et continuera à aider les Maliens, en dépit des tensions venant du gouvernement de transition malien. Il rappelle que l’Algérie est reconnue comme puissance régionale incontournable, tant par les États-Unis que par les grandes puissances, et qu’elle constitue un facteur de stabilité essentiel dans la région.
Il a aussi noté que le Mali a toujours besoin de l’Algérie, alors que certaines forces instrumentalisées tentent d’empoisonner les relations entre les deux pays, ce que l’Algérie perçoit clairement et cherche à contrer par une diplomatie vigilante et rationnelle. Dans ce cadre, la déclaration du président Tebboune réaffirme que le retour à l’Accord d’Alger pour la paix et la réconciliation reste inévitable pour les Maliens, notamment à la lumière des récents événements dans le nord du Mali, qui ont prouvé que la logique de la force ne fait qu’aggraver les fractures, tandis que le dialogue demeure la voie la plus proche pour rapprocher les points de vue.
Il a souligné que les projets de développement conduits par l’Algérie avec les pays africains, notamment dans le Sahel, suscitent un vif intérêt. Parmi ces projets figurent le gazoduc transsaharien (Algérie-Nigeria), le projet de fibre optique, la route transsaharienne et d’autres projets stratégiques, capables de transformer la région d’un foyer de tensions en un espace de paix, de développement et de rapprochement entre les peuples.
Mabrouk Kahy a conclu en soulignant que l’Algérie considère la Libye et le Mali comme faisant partie intégrante de sa profondeur stratégique, maghrébine et africaine, et adopte une approche basée sur la stabilité, le dialogue et le développement, afin de renforcer la sécurité régionale et servir l’avenir des peuples.
Il a également indiqué que la déclaration du président intervient dans un contexte régional marqué par des développements graves dans certains pays arabes, notamment au Soudan et en Syrie, où les conflits internes alimentés par des mercenaires ont détruit les institutions étatiques et approfondi les divisions sociétales.
Il a conclu en soulignant que l’Algérie, qui considère la Libye comme un pilier du système maghrébin, ne souhaite pas que ce pays sombre dans le même chaos, raison pour laquelle elle adopte une position équidistante vis-à-vis de toutes les parties libyennes.
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