Le comité chargé de la rédaction de la proposition de loi criminalisant le colonialisme a atteint une phase décisive, à l’approche de la clôture de la session actuelle de l’Assemblée populaire nationale (APN), prévue dans trois semaines, ce qui ajoute une pression supplémentaire.
Les membres du comité, composé de sept députés représentant les principaux groupes parlementaires (les six blocs reconnus et les représentants de la diaspora politique), ressentent le poids de la tâche alors que la date limite approche. Ils portent la responsabilité de produire une proposition de loi complète, mûre et susceptible d’être défendue politiquement et juridiquement, accompagnée d’un cadrage juridique et historique renforçant cette revendication, ancienne mais toujours d’actualité.
Selon les témoignages de certains membres, une réunion décisive avec le président de l’Assemblée populaire nationale, Brahim Boughali — qui a parrainé l’initiative en mars dernier — est attendue dans les prochains jours. Le projet avait été réclamé par une partie de l’élite politique et de la famille révolutionnaire.
Nos sources indiquent que le fait que le président de l’Assemblée ne parte pas au pèlerinage (hajj) a facilité le travail du comité, en permettant une évaluation de ce qui a été accompli jusqu’à présent et un ajustement de l’agenda avant la clôture de la session, afin de lancer la rédaction finale.
Le comité a veillé à garder ses travaux sous un strict secret, réduisant au minimum l’exposition médiatique de ses membres et tenant ses difficultés à l’écart des projecteurs — notamment le non-respect de certaines sorties de terrain programmées ou les rumeurs évoquant l’enterrement de l’initiative, à l’instar d’autres similaires dans le passé.
La classe politique et l’opinion publique nationale attendent avec espoir les conclusions du comité, espérant que cette législature laissera une réalisation historique.
Mohand Arezki Ferrad, historien, chercheur et initiateur d’une proposition de loi sur la criminalisation du colonialisme, a déclaré au journal El Khabar : « Je serais très heureux de voir cette loi adoptée. »
Malgré les déceptions causées par l’absence de déplacements sur le terrain et le peu de retombées de certaines rencontres, des membres du comité interrogés par El Khabar ont exprimé leur satisfaction quant aux éléments recueillis et aux documents compilés lors des entrevues organisées à l’annexe de l’Assemblée à Alger, dans les locaux des Archives nationales, de l’Organisation des moudjahidines, ainsi qu’à travers des échanges avec des membres du Comité national de la mémoire. Une rencontre s’est également tenue la veille de l’Aïd El-Adha avec Fatma-Zohra Benbraham, experte juridique et historienne reconnue, notamment pour son engagement en faveur des victimes algériennes des essais nucléaires français dans le sud du pays. Avocate ayant plaidé en France et participé à des conférences nationales et internationales sur la question, elle a fourni un exposé complet sur les crimes du colonialisme commis durant les 132 ans d’occupation.
Les membres du comité ont tenu à rassembler des données et recherches documentées sur les massacres et violations perpétrées par le colonialisme français, que ce soit durant l’invasion, la répression des révoltes populaires ou les massacres du 8 mai 1945, où des milliers d’Algériens ont été exécutés, notamment à Guelma, Sétif et Kherrata, alors qu’ils manifestaient pour leur droit à l’autodétermination. Ces éléments seront inclus dans l’exposé des motifs afin de promouvoir la légitimité de cette revendication, non seulement en Algérie mais aussi en France, où une partie de l’opinion publique et de la classe politique considère cette reconnaissance comme un pas symbolique vers une réconciliation mémorielle aujourd’hui en suspens du fait des tensions multiformes entre les deux pays.
Dépassement de la problématique des Accords d’Évian
Selon nos sources, le comité a pris en compte les problématiques soulevées par les Accords d’Évian de 1962, qui pourraient constituer un obstacle aux demandes de reconnaissance, d’excuses et de réparations. Le projet de loi vise à criminaliser toutes les phases du colonialisme, pas seulement la guerre de libération (qui a duré sept ans et demi), en s’appuyant sur des preuves historiques documentées des crimes perpétrés durant les 132 années d’occupation, incluant les massacres de masse, la destruction systématique de l’identité algérienne, ainsi que les essais nucléaires aux conséquences humaines et environnementales encore visibles aujourd’hui.
Le projet de loi prévoit des articles explicites criminalisant toutes les formes de répression et de violations commises par le colonialisme français, dans le but d’obliger la France à reconnaître sa responsabilité historique et à indemniser les victimes et leurs familles.
Il est à noter que les efforts de l’Assemblée populaire nationale pour criminaliser le colonialisme ont reçu le soutien explicite du Conseil de la nation, ce qui donne un élan à l’initiative et renforce la possibilité d’aboutir à un texte de loi consensuel.
Azouz Nasri, dans son premier discours après sa nomination, a réaffirmé l’attachement du Parlement à la demande d’excuses officielles de l’État français. Il a appelé, dans ce cadre, les « libres de France », parmi les officiels, les politiciens, les parlementaires et les historiens, à « s’impliquer dans cette démarche et à ne pas la laisser sombrer dans l’oubli, le déni ou le silence ». Il a souligné que « la préservation de la mémoire historique nationale et l’inspiration de son esprit et de ses enseignements représentent un devoir patriotique ».
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