La ministre de la Culture et des Arts, Malika Bendouda, œuvre à relancer le rôle et la fonction du théâtre en Algérie, après que celui-ci a fortement régressé, voire presque disparu de la société, perdant quasiment tout son public face à l’essor et à la domination des réseaux sociaux, ainsi qu’aux transformations profondes des habitudes de réception à l’échelle mondiale, et plus particulièrement en Algérie.
Lors d’une réunion tenue hier au Palais Moufdi Zakaria à Alger avec les directeurs des théâtres à l’échelle nationale, la ministre a invité les présents à adopter ce qu’elle a qualifié de « nouvelle approche », fondée sur « le passage du théâtre de son cadre architectural à sa dimension fonctionnelle et sociétale ». Elle a rappelé le rôle central qu’a joué cet art ancestral dans la sensibilisation, l’éducation et l’éveil des individus, en leur insufflant un esprit rationnel, critique, civilisationnel et patriotique, avant son déclin durant les années 1990, après que de nombreuses figures et icônes de la scène théâtrale aient été ciblées.
Selon un communiqué du ministère, la rencontre nationale des directeurs des théâtres régionaux a permis de présenter les grandes lignes de la nouvelle orientation de la politique de l’État dans le domaine du théâtre, avec l’annonce d’une série de « décisions souveraines et d’orientations stratégiques visant à dépasser la logique d’une gestion administrative figée pour ancrer une action culturelle vivante au sein de l’institution théâtrale ».
La ministre a annoncé un ensemble de décisions financières et de gestion, dont notamment un soutien financier immédiat sous forme de subventions et d’aides directes pour la production de nouvelles œuvres théâtrales, ainsi que l’amélioration de la situation actuelle des institutions.
Il a également été décidé une hausse les budgets des théâtres au titre des « obligations de service public pour l’année 2026, afin de faire face aux défis actuels », parallèlement au « lancement d’une vaste opération de restructuration du secteur théâtral, qui aboutira à la création d’une instance nationale du théâtre ». Un projet dont il est encore prématuré d’évaluer le succès et l’efficacité, mais dont les contours indiquent qu’il nécessitera un engagement sérieux et des efforts réels pour se concrétiser dans les pratiques et sur le terrain.
Dans son diagnostic de la crise que traverse le secteur, la ministre a affirmé que la véritable crise ne réside pas uniquement dans les salles ou les lois, mais dans « l’absence d’initiative ». Elle a souligné que le théâtre doit aujourd’hui répondre à des questions existentielles : « Pour qui produisons-nous ? Et quel impact laissons-nous ? », estimant ainsi que la crise concerne aussi le créateur lui-même, et pas uniquement la question du financement.
Elle a ajouté qu’il n’est pas possible de laisser « les théâtres de l’État dans un état statique, insistant sur le fait qu’il s’agit d’espaces de dialogue sociétal et d’expérimentation artistique audacieuse. Tout en précisant que « la prochaine étape est celle du contrat d’efficacité : la confiance contre la responsabilité, le soutien contre des résultats concrets ».
La ministre a exhorté les directeurs des institutions théâtrales à adopter « la planification stratégique au lieu de la programmation routinière », résumant les priorités de la prochaine phase dans « l’efficacité financière basée sur une gestion rationnelle des ressources, la recherche de financements et de partenariats d’investissement en complément des aides de l’État, ainsi que l’activation de contrats de performance pour les gestionnaires ».
Elle a également appelé à adopter la philosophie de la « qualité artistique », qui se traduit par « une programmation régulière de spectacles répondant à des critères artistiques précis », tout en réexaminant les mécanismes de fonctionnement des commissions artistiques, afin de garantir la production d’œuvres capables de « ramener le public dans les salles, d’interagir avec son goût esthétique et d’assurer au théâtre algérien une présence qualitative et honorable dans les manifestations et festivals internationaux ».
Parmi les mécanismes de réforme figure, selon le communiqué, « l’ouverture stratégique », qui vise à transformer les théâtres en « incubateurs pour les troupes indépendantes et les créateurs », ainsi qu’à renforcer le partenariat avec le secteur de l’éducation afin de faire du théâtre un parcours éducatif durable.
La ministre a conclu la rencontre en affirmant que ces orientations constituent le point de départ d’un vaste chantier de réforme, appelant les directeurs à « penser en dehors des cadres traditionnels » et à libérer l’action théâtrale des contraintes bureaucratiques, afin de bâtir un théâtre à la hauteur des aspirations du peuple algérien et de son identité ancestrale.
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