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Retailleau, "le grand perdant"

Sa popularité, qu’il avait bâtie sur ses attaques répétées contre l’Algérie, a chuté après qu’il a provoqué la crise politique en France.

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L’ancien ministre français de l’Intérieur, Bruno Retailleau, se retrouve dans une impasse politique interne après avoir décidé que son parti ne participerait pas au second gouvernement Lecornu, alors que plusieurs cadres du parti ont fait le choix inverse et figurent désormais dans la nouvelle équipe gouvernementale annoncée avant-hier soir. Cette situation a déclenché une véritable crise au sein des Républicains, dont le grand perdant, selon une partie de la presse française, serait Retailleau lui-même.

Les difficultés de Retailleau se sont aggravées depuis qu’il a contribué à la chute du premier gouvernement Lecornu, plongeant le pays dans une crise politique profonde qui a duré plus d’une semaine. L’homme, connu pour ses attaques répétées contre l’Algérie, semble désormais incapable de définir une stratégie claire pour son parti face aux bouleversements de la scène politique.

En déclarant, ces dernières heures, qu’il allait exclure les ministres de droite ayant choisi de rejoindre le second gouvernement, Retailleau aurait, selon les analyses médiatiques, « aggravé la crise », ruinant ainsi tout le capital politique accumulé l’année précédente, selon les propos d’un cadre du parti.

De plus en plus isolé après son refus de participer au gouvernement, Retailleau a vu plusieurs figures importantes de sa formation se rebeller contre lui en acceptant des postes ministériels. Il perd ainsi une grande partie de la popularité qui faisait de lui un candidat crédible pour la présidentielle de 2027.

Son refus de participer à la nouvelle équipe apparaît, pour certains observateurs, comme une manœuvre tactique destinée à se distancer de la « macronie » et à se libérer du poids de cet héritage politique, en vue d’éventuelles élections législatives anticipées ou d’une présidentielle avancée. Mais la méthode et le timing de son retrait ont eu l’effet inverse : ses adversaires l’accusent désormais d’avoir « déstabilisé le pays ».

Les partisans du ministre, pourtant l’un des plus populaires du précédent gouvernement, avaient déjà annoncé leur intention de rompre avec la macronie pour préparer sa candidature à l’Élysée. Sa ligne dure envers l’Algérie — jugée opportuniste et électoraliste — n’a fait qu’amplifier les critiques à son encontre, d’autant que la chute du gouvernement Lecornu, causée par son refus du ministre de la Défense Bruno Le Maire, a été perçue comme un acte d’orgueil personnel.

Selon Le Monde, un dirigeant républicain ayant requis l’anonymat a déclaré :« Faire tomber le gouvernement à cause d’un ministre qui ne lui plaît pas, c’est inacceptable et cela détruit tout l’élan que nous avions construit depuis un an. »

Après sa reconduction comme ministre de l’Intérieur dans le premier gouvernement Lecornu, Retailleau avait exprimé publiquement son mécontentement sur X (ancien Twitter) face à la nomination de Bruno Le Maire à la Défense — une réaction qui a précipité la chute du gouvernement à peine quelques heures après son annonce. Le sénateur du Nord Marc-Philippe Daubresse, proche de Retailleau, a reconnu : « Ce n’était pas une bonne décision pour notre parti. Il y a eu une rupture de confiance, et Retailleau est tombé dans le piège. »

Un sondage de La Tribune du Dimanche, publié hier, montre une chute de 7 points de la popularité de Retailleau en un mois, tandis que celle de Sébastien Lecornu a augmenté de 11 points.

Enfin, la décision du chef des Républicains de boycotter le premier gouvernement Lecornu, le 5 octobre, a non seulement entraîné la chute d’un exécutif qui n’a duré que 24 heures, mais aussi provoqué une grave crise interne dans son parti. Lors de la réunion du bureau politique samedi dernier, pourtant largement favorable au refus de participer au gouvernement, les débats ont dégénéré en insultes et départs précipités de plusieurs élus.