L’Assemblée nationale française (la chambre basse du Parlement) se prépare, jeudi prochain, à débattre d’une proposition visant à dénoncer l’accord sur l’immigration de 1968, une démarche qui pourrait encore aggraver les tensions entre les deux pays, d’autant plus qu’elle coïncide avec la célébration de l’anniversaire de la glorieuse Révolution.
La discussion de cette proposition intervient quelques jours après la publication d’un rapport parlementaire rédigé par les députés Charles Rodwell et Mathieu Lefèvre, qui ont estimé le coût financier de l’accord à environ deux milliards d’euros par an, considérant que « l’immigration algérienne » représente un fardeau social et administratif pour la France.
Pourtant, les statistiques confirment que la France bénéficie des cadres et compétences algériennes, puisque plus de 19 000 médecins algériens exercent dans les hôpitaux français, selon les dernières données du Conseil national de l’Ordre des médecins français, dont 6 000 ont effectué leurs études dans les universités algériennes.
L’initiative est menée par le Rassemblement national, avec le soutien de partis d’extrême droite, tels que l’Union de la droite pour la République, ainsi que de partis du centre qui réclament eux aussi la révision de l’accord. Il semble que le véritable objectif derrière cette démarche ne soit pas juridique, mais plutôt politique et électoral : la droite et l’extrême droite cherchent à exploiter le dossier de l’immigration et celui de l’Algérie pour gagner des voix, en alimentant un discours de peur de l’autre.
De son côté, l’Algérie estime que l’accord de 1968 a été vidé de son contenu à cause des modifications et restrictions françaises successives, notamment après l’instauration du visa pour les Algériens en 1986. L’accord ne confère plus aucun avantage réel, contrairement à ce que prétend le discours politique français.
Des responsables et observateurs affirment que parler d’avantages particuliers pour les Algériens relève d’une pure manipulation médiatique, car l’accord n’est plus appliqué dans les faits ; il s’est transformé en un instrument de pression politique que Paris utilise chaque fois qu’elle souhaite tendre les relations ou détourner l’attention de ses problèmes internes.
Dans ce contexte, le député à l’Assemblée populaire nationale, Nacer Bettiche, du Front de libération nationale (FLN), a déclaré à El Khabar qu’« Il est regrettable que certains députés de l’Assemblée nationale française en viennent à demander la fin de l’accord sur l’immigration signé en 1968 entre l’Algérie et la France, alors que tout le monde sait que cet accord a été vidé de sa substance initiale par les modifications successives qui l’ont dénaturé et en ont rompu l’équilibre et l’esprit originels».
Ainsi, selon lui, parler aujourd’hui de “révision de l’accord” n’a ni fondement juridique ni réalité concrète. Cela traduit plutôt une approche politicienne étroite dans laquelle les relations algéro-françaises sont instrumentalisées au service d’agendas internes et électoraux.
La discussion de cette proposition à l’Assemblée générale coïncide avec les célébrations du 71ᵉ anniversaire du déclenchement de la guerre de libération, un calendrier qui reflète la profondeur du complexe français vis-à-vis de l’indépendance de l’Algérie. Certains milieux à Paris continuent de regarder l’Algérie à travers un prisme colonial, la considérant comme un prolongement de l’influence française plutôt qu’un État indépendant et souverain.
À ce propos, Bettiche a souligné que le choix de la date du 30 octobre « porte des significations que nul ne peut ignorer et montre que certaines parties en France persistent à voir l’Algérie sous l’angle du passé, en ravivant des dossiers historiques au lieu de se tourner vers un avenir fondé sur le respect mutuel et les intérêts partagés. »
Ce complexe est apparu à plusieurs reprises, notamment dans les déclarations du président Emmanuel Macron en 2021, lorsqu’il avait mis en doute l’existence d’une “nation algérienne avant la colonisation”, ce qui avait alors provoqué une crise diplomatique. Il se manifeste aussi dans le refus récurrent de la France de présenter des excuses pour ses crimes coloniaux, de restituer l’ensemble des archives ou les dépouilles des martyrs.
La France exploite également des dossiers tels que les visas et l’immigration chaque fois qu’elle veut détourner l’attention de ses crises économiques et politiques internes.
Bettiche a affirmé que « l’Algérie, qui a recouvré sa souveraineté grâce à d’immenses sacrifices, ne tolérera aucune mesure portant atteinte aux droits de sa communauté ni aucune tentative de redéfinir la relation bilatérale en dehors du cadre de l’égalité et de la pleine souveraineté. »
Et d’ajouter : « Si certains misent sur la pression ou le chantage politique, ils se trompent lourdement, car l’Algérie d’aujourd’hui est un État sûr de lui, attaché à ses principes et vigilant face à toute tentative d’instrumentaliser la mémoire ou la communauté nationale dans les conflits d’autrui. »
Bettiche a conclu en soulignant que, dans ce contexte symbolique, le 1ᵉʳ Novembre reste le témoin du fait que le peuple algérien ne renonce jamais à sa dignité et refuse que ses symboles nationaux soient utilisés dans un jeu politique éphémère.
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