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Diabolisation et chantage contre l'Algérie

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Diabolisation et chantage contre l'Algérie
Diabolisation et chantage contre l'Algérie

Les politiciens français, en période de crise interne, utilisent la relation avec l’Algérie pour séduire des "lobbies et groupes de pression" au sein de la société française et ainsi renforcer leurs positions politiques, notamment à l'approche des échéances électorales. Dans ces moments, la "paix et la guerre" avec l’Algérie deviennent des enjeux majeurs influençant les résultats. C’est ainsi que l’on assiste aujourd’hui à une véritable "enchère" à Paris : qui diabolise le plus l’Algérie sur les plateaux télévisés et les réseaux sociaux ? Jamais la France n’a connu un tel niveau de débâcle et de déclin dans sa politique.
Il n’est même plus nécessaire de suivre les bulletins météo pour constater que les relations entre Alger et Paris traversent des turbulences avec un ciel chargé de nuages, une tension électrique et des vents violents. Il suffit de compter le nombre de tweets publiés en un temps record par le ministre de l’Intérieur français, Bruno Retailleau, pour vomir sa haine envers l’Algérie, ou encore le nombre d’interviews télévisées qu’il a données. Pourtant, ses rivaux de l’extrême droite, héritiers de Marine Le Pen, l’accusent de ne faire que "parler", alors qu’eux réclament des "sanctions concrètes" contre l’Algérie. Ainsi, la surenchère est ouverte à celui qui attaquera le plus l’Algérie dans ce courant raciste.
Tout cela confirme que le seul projet politique en cours à Paris, jusqu’à l’élection présidentielle française, est d’attiser la crise diplomatique avec l’Algérie pour détourner l’attention des problèmes internes de la France, notamment la difficulté d’adopter le budget 2025 en raison de la crise politique et financière qui la secoue.
Parce que le poste de ministre de l’Intérieur est lié aux attentes de l’extrême droite, Retailleau, accompagné du ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, brandit la menace de la réduction des visas comme moyen de pression sur l’Algérie pour qu’elle accepte de rapatrier ses ressortissants sous le coup d'une OQTF (obligation de quitter le territoire français). Pourtant, l’Algérie n’est pas la seule concernée par ces mesures, 13 autres pays le sont également, mais son nom est systématiquement mis en avant.
Pourquoi donc ce traitement à deux vitesses, alors que l’Algérie n’a jamais refusé les rapatriements ? En 2024, elle a même accepté 2 504 de ses ressortissants en situation irrégulière, dont 1 619 expulsés de force, à condition que leur situation soit étudiée au cas par cas.
En revanche, pourquoi Paris refuse-t-elle d’aborder les demandes algériennes concernant l’extradition des personnes recherchées par la justice algérienne, notamment celles impliquées dans des affaires de sécurité, de corruption ou encore la restitution des fonds et biens détournés par d’anciens responsables de l’État ?
C'est le cœur du problème...
Le ministre Bruno Retailleau semble vouloir appliquer à l’Algérie une version déformée du dicton chrétien : "Si ton frère te frappe sur la joue droite, tends-lui la gauche". Pourtant, les dirigeants français oublient qu’aucun pays au monde ne sait mieux décrypter leurs intentions que l’Algérie – parfois même avant qu’elles ne soient formulées et maquillées par le discours officiel.
Après la fausse polémique sur les prétendues aides financières de la France à l’Algérie (130 millions d’euros), démentie par l’Agence française de développement, puis la volonté de faire porter à l’Algérie la responsabilité de la crise migratoire en France en ciblant l’accord franco-algérien de 1968 – attaqué de toutes parts par l’extrême droite – ou encore l’idée que les problèmes du système de santé français seraient dus aux factures impayées des soins des ressortissants algériens… on assiste aujourd’hui à une autre absurdité : celle de faire croire que la dette abyssale de la France (dépassant 3 200 milliards d’euros) serait imputable à l’Algérie, comme le prétend la journaliste Sarah Knafo.
Toute cette désinformation a un seul objectif, comme l’a avoué le député d’extrême droite Julien Odoul : "Faire taire les Algériens sur la colonisation". C’est bien là le cœur du problème. Les héritiers de Jean-Marie Le Pen, architecte de la torture durant la guerre d’Algérie, veulent aujourd’hui imposer le silence à Alger sur les questions de mémoire, de reconnaissance des crimes coloniaux et de réparations.
Or, l’Algérie est une nation née d’une révolution immense. Elle ne peut – même si elle le voulait – oublier son passé glorieux, porteur de valeurs humanistes. Ce sont ces principes qui imposent à la France, comme à tout autre pays, de traiter l’Algérie sur une base unique et non négociable : l’égalité et le respect mutuel. Toute autre approche est vouée à l’échec, quelles que soient les stratégies et les manœuvres mises en place.
Dès lors, une question essentielle se pose : la France souhaite-t-elle réellement bâtir une relation de partenariat et d’amitié avec l’Algérie, comme le font de nombreux autres pays n’ayant pourtant ni passé colonial ni proximité linguistique avec elle ?
Il ne s’agit pas seulement d’un doute, mais d’une certitude : les décideurs français ne veulent pas d’une relation fondée sur la clarté et la bonne foi. L’extrême droite, le lobby sioniste et l’oligarchie économique dictent aujourd’hui l’agenda de l’Élysée et de Matignon. C’est ainsi qu’Emmanuel Macron a renié la position traditionnelle de la France sur la question du Sahara occidental, s’alignant sur les thèses marocaines sous la pression des milieux ultraconservateurs. Le sort du président français et de son gouvernement semble désormais suspendu aux décisions de l’extrême droite, qui veut régler ses comptes avec l’Algérie avant l’échéance de mars prochain, où Marine Le Pen pourrait être écartée de la course présidentielle de 2027 en raison d’une décision judiciaire. C’est ce contexte qui pousse Retailleau, Darmanin et même Édouard Philippe à surenchérir dans l’hostilité envers l’Algérie, conscients que la relation "paix ou tension" avec Alger influence profondément la politique intérieure française.
Il est vrai que la France n’a jamais caché son attachement à ses intérêts en Algérie, qu’elle cherche à préserver face à la concurrence croissante des Chinois, des Américains, des Allemands et des Russes, qui ont renforcé leurs partenariats avec Alger ces dernières années. Mais tandis que l’Algérie adopte une approche pragmatique du partenariat gagnant-gagnant, les élites politiques françaises restent enfermées dans une vision dépassée, considérant toujours l’Algérie comme une "chasse gardée". Cette attitude anachronique n’a fait que précipiter le déclin de l’influence française, faisant perdre à Paris des positions stratégiques qu’elle détenait encore du temps de la colonisation.
L'effondrement de la confiance... et la perte du butin
En attendant que l'organisation française "Medef" fasse son bilan, l'Algérie n'a plus besoin d'acheter du blé français, ayant trouvé ses besoins sur le marché russe à des prix raisonnables. Les Algériens ne se soignent plus dans les hôpitaux français, préférant désormais ceux de Belgique, d'Allemagne et de Turquie. Elle n'importe plus de veaux de France comme elle l'a fait pendant des décennies, ayant ouvert son marché à l'Espagne et au Brésil. De même, le flux de voitures entre Paris et Alger a décliné au profit d'un axe Italie-Chine-Algérie en plein essor, sous le regard silencieux du Medef, qui finira tôt ou tard par "crier" la perte de son "butin".
L'organisation finira par admettre que l'appel à Emmanuel Macron, lancé il y a deux ans dans Le Point par l'écrivain franco-marocain Tahar Ben Jelloun, lui conseillant de privilégier le Maroc plutôt que l’Algérie, n'était qu'un mensonge – tout comme les thèses de l’écrivain Boualem Sansal.
Il est vrai qu'en apparence, la majorité des déclarations officielles françaises affichent la volonté de bâtir une relation d’amitié avec l’Algérie. Mais dans la pratique quotidienne, c’est une tout autre réalité. Celui qui souhaite voir l’Algérie lui ouvrir les bras ne peut pas laisser des figures comme Bruno Retailleau, Éric Ciotti, Éric Zemmour et Marine Le Pen – fervents défenseurs de la loi du 23 février 2005 glorifiant la colonisation en Afrique du Nord – saboter les efforts de rapprochement. Une loi que Jordan Bardella veut aujourd’hui réhabiliter en déclarant que "les Français ne doivent pas avoir honte de leur passé colonial", à l’opposé du journaliste chevronné Jean-Michel Aphatie, qui rappelle que la France a laissé l’Algérie en ruines, et non en "petite Suisse", comme ose l’affirmer la petite-fille de Le Pen.
Enfin, quiconque souhaite réellement tourner la page avec l’Algérie ne peut permettre à Bernard-Henri Lévy, Sarah Knafo ou aux chaînes d’information du magnat Vincent Bolloré de traiter un dossier aussi crucial que les relations algéro-françaises avec tant de légèreté et d’arrière-pensées idéologiques.
De Villepin met en garde contre l’impasse
Avec des déclarations empreintes de rancœur et révélant une mentalité coloniale persistante chez la génération qui dirige actuellement la France, peut-on réellement espérer une avancée dans les relations entre les deux pays ? Pour l’ancien Premier ministre et diplomate chevronné Dominique de Villepin, « lorsqu’on fait de la politique intérieure en instrumentalisant la politique étrangère, on finit toujours dans une impasse ». Une critique sévère à l’encontre du ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, qui incarne la ligne dure du gouvernement français vis-à-vis de l’Algérie. « La surenchère ne mènera à rien, et ce n’est pas en jouant au bras de fer que l’on atteindra nos objectifs », a-t-il affirmé, dénonçant au passage le « style théâtral » d’un ministre qui cherche avant tout les projecteurs médiatiques. Il a ajouté : « Les problèmes avec l’Algérie ne se règlent pas par une déclaration au journal de 20h de TF1… C’est une attitude d’amateur. »
De Villepin, mieux que quiconque parmi les élites françaises, mesure l’ampleur des dégâts causés par ces déclarations sur la coopération entre les deux pays, notamment dans les domaines économique et sécuritaire. Restaurer la confiance nécessitera un travail diplomatique de grande envergure, à plusieurs niveaux.
Les ministres et chefs de partis de droite ont multiplié les déclarations hostiles à l’Algérie, sans la moindre retenue diplomatique, frisant l’incitation et l’ingérence flagrante dans les affaires d’un État souverain. Ce n’est qu’un énième chapitre d’un « registre de haine » que ce courant politique voue à l’Algérie, tout simplement parce qu’elle leur rappelle leur passé colonial sombre.
²6L’Algérie a toujours posé comme condition essentielle à une relation d’amitié avec Paris la reconnaissance officielle des crimes commis contre le peuple algérien. Une exigence que la France, par la voix du président Emmanuel Macron, a tenté d’adresser par des gestes symboliques, mais qui reste largement insuffisante. Benjamin Stora lui-même admet que ces efforts se heurtent en France à « de nombreuses forces refusant de reconnaître la réalité de la nation algérienne et ses figures emblématiques ».
L’Algérie n’est plus seule dans cette revendication. Désormais, c’est toute l’Afrique qui exige que la France assume son passé, et cette requête figure même dans l’agenda officiel de l’Union africaine. Pendant ce temps, Paris se retrouve de plus en plus isolée sur le continent, perdant son influence et voyant ses soldats expulsés du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest, comme un jeu de dominos… Qui, au final, a réellement reculé ?
Ce lourd passif historique légué par la France ne peut être balayé d’un revers de main. Laisser l’extrême droite dicter le ton des relations franco-algériennes ne fera qu’épaissir le froid déjà installé entre les deux pays, d’autant plus que des dossiers majeurs restent en suspens depuis des années : la question des visas et de la libre circulation des citoyens, l’accord sur les déchets nucléaires, la restitution des archives et des objets spoliés.
Mais au-delà de toutes ces tensions, le principal obstacle à l’amélioration des relations demeure le refus persistant de Paris d’accepter un rapport d’égalité. Tant que certains responsables politiques français resteront prisonniers de la nostalgie d’une « Algérie française », aucun véritable réchauffement ne sera possible.