Le 17 juillet 2025, l’Algérie a annoncé avoir été « surprise » par une décision prise la veille, le 16 juillet, par l’Union européenne, dans laquelle cette dernière annonce le lancement d’une procédure d’arbitrage dans le cadre de son différend avec l’Algérie au sujet de « restrictions imposées au commerce et à l’investissement », en vigueur depuis 2021, estimant qu’il s’agit là d’une violation de l’Accord d’association en vigueur depuis 2005.
Quels sont les détails du différend entre les deux parties, et que reproche chacune des parties à l’autre ?
Le 14 juin 2024, la Commission européenne (organe exécutif de l’UE) avait exprimé son opposition à une série de décisions prises par l’Algérie depuis trois ans, portant sur la régulation des importations et la stimulation de la production locale. Ces mesures incluaient un système d’autorisations d’importation, des incitations à l’utilisation d’intrants locaux dans le secteur automobile, ainsi que des restrictions sur l’importation de produits agricoles, et des règles encadrant la participation étrangère dans les entreprises importatrices.
La Commission a estimé que ces mesures constituaient des restrictions commerciales à ses exportations vers l’Algérie, contrevenant aux clauses de l’accord d’association. Elle avait alors brandi la menace de recourir à l’arbitrage international, prévu par l’accord comme mécanisme possible en cas de litige commercial entre les deux parties.
Elle avait déclaré que cette démarche visait à ouvrir un dialogue constructif pour lever les restrictions concernant notamment les produits agricoles, les véhicules, les autorisations d’importation, les conditions de production locale, ainsi que le plafonnement de la participation étrangère dans les sociétés importatrices.
L’Algérie a, de son côté, défendu ces mesures comme s’inscrivant dans un plan national de réduction de la facture des importations, dans le cadre d’une stratégie visant à diversifier l’économie, réduire la dépendance aux hydrocarbures, et renforcer l’industrialisation locale. Elle a affirmé avoir traité les réserves de l’UE dans une logique souveraine, considérant qu’il s’agit d’une affaire interne, échappant au droit de regard de la Commission européenne.
En septembre 2024, le ministre des Affaires étrangères, Ahmed Attaf, avait répondu par écrit à une question du député du Mouvement de la société pour la paix, Abdelouahab Yagoubi, à propos de ce différend. Il y affirmait que l’arbitrage demandé par l’Union européenne ne constituait pas une sanction à l’encontre de l’Algérie, mais plutôt l’ouverture d’un contentieux commercial dans lequel la Commission demande la levée de certaines mesures mises en place par l’Algérie depuis 2021, dans le cadre de sa politique de rationalisation des importations et de promotion des intrants nationaux dans l’industrie automobile.
Il avait annoncé, à la même occasion, le lancement de concertations officielles avec la partie européenne en vue d’un règlement amiable du différend, ajoutant que le recours au mécanisme bilatéral d’arbitrage prévu par l’accord d’association demeurait peu probable, les litiges de cette nature étant généralement résolus par le dialogue et le compromis durant la phase de concertation.
Ces concertations ont effectivement débuté en février 2025, entre une délégation gouvernementale algérienne et une mission de la direction du commerce de la Commission européenne. Elles ont permis à la partie algérienne d’exposer sa vision générale de l’accord commercial liant les deux parties depuis vingt ans.
Quelques mois avant l’ouverture des concertations, Ahmed Attaf avait déclaré, dans un entretien à la presse, que l’accord était entaché de déséquilibres très préjudiciables à l’Algérie. Il avait confié aux Européens que l’accord était devenu un fardeau pour l’économie algérienne. Il avait souligné que la valeur des échanges commerciaux entre les deux parties avait atteint 1 000 milliards de dollars depuis 2005, alors que les investissements européens en Algérie n’avaient pas dépassé 13 milliards de dollars, et que 12 milliards de dollars de bénéfices avaient été transférés au profit d’entreprises européennes. « Cette situation n’est plus acceptable », avait-il tranché.
Attaf avait, une nouvelle fois, appelé à une révision de l’accord. Si l’Union européenne, par la voix de son ambassadeur en Algérie, s’est dite ouverte à une telle révision. Cette dernière a néanmoins conditionné toute modification de l’accord à une levée préalable des restrictions imposées aux importations.
Deux réunions ont été organisées entre les délégations des deux parties sur ce dossier épineux, mais aucun compromis n’a pu être trouvé, ce qui a conduit la Commission à opter pour l’arbitrage international comme voie de règlement du différend.
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