Nation

France : Retailleau en mission de renverser la Ve République

Il a qualifié le macronisme de source d’impuissance.

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L'escalade verbale du ministre français de l'Intérieur à l’égard de l'Algérie, en rupture flagrante avec les usages diplomatiques consacrés par la Convention de Vienne, n’est que la partie émergée de l’iceberg au sein d’un exécutif français de plus en plus menacé d’implosion.

Jeudi, Emmanuel Macron a sèchement refusé de recevoir son ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, après ses propos fracassants sur la fin du macronisme. C’est finalement François Bayrou, Premier ministre, qui a été chargé par l’Élysée de s’entretenir avec Retailleau, notamment sur les dossiers sensibles, dont celui des relations algéro-françaises. Une décision qui intervient dans un climat de tensions croissantes, alimenté par une interview controversée du ministre accordée à Valeurs Actuelles.

Retailleau, président du parti Les Républicains et figure clivante du gouvernement, n’a pas hésité à déclarer que « le macronisme prendra fin avec Emmanuel Macron », le qualifiant même de source d’impuissance. Des propos qui ont déclenché une onde de choc au sein de la majorité présidentielle, plongeant le conseil des ministres de mercredi dans une atmosphère glaciale.

Lors de ce même conseil, Macron a interpellé Retailleau sur les violences urbaines survenues à Nîmes, Béziers et Limoges, lui rappelant que les budgets de la police avaient augmenté sous sa présidence, contrairement à ceux de l’ère Sarkozy. Concernant la loi « Duplomb », Macron a exprimé son désaccord avec certaines de ses « approximations », un reproche à peine voilé au ministre.

De son côté, l’ex-socialiste Élisabeth Borne, aujourd’hui ministre de l’Éducation, a accusé Retailleau de « fracturer le socle commun » et de « fragiliser les digues contre l’extrémisme ». La ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, a quant à elle défendu le macronisme comme « une voie pragmatique face à la montée des populismes ».

Retailleau, par ses sorties tonitruantes et sa gestion solitaire du dossier algérien, au mépris de la ligne diplomatique officielle, ne ferait ainsi que creuser davantage le fossé entre lui et l’Élysée, où la prudence reste de mise sur le sujet sensible des relations avec Alger.

Beaucoup soupçonnent Retailleau de suivre le même chemin qu’Emmanuel Macron en 2016, lorsqu’il avait amorcé sa rupture avec François Hollande avant de lancer sa campagne présidentielle. En multipliant les provocations, il préparerait ainsi son départ du gouvernement en vue de se présenter à la présidentielle de 2027.

Cette guerre froide interne soulève désormais une autre question : non pas si Les Républicains quitteront le gouvernement, mais quand. En confiant l’entretien avec Retailleau à François Bayrou, Macron semble vouloir sanctionner son ministre sans confrontation directe, dans un contexte déjà alourdi par les débats budgétaires pour 2026 et les polémiques autour de la loi Duplomb.

Sur le plan international, Macron accumule les revers. En interne, il pourrait bientôt être contraint de se passer d’une partie de son équipe ministérielle. L’atmosphère délétère au sein de l’exécutif, désormais discrédité aux yeux d’une opinion publique en perte de confiance, augure un été et un automne explosifs en France.

Alors que les tensions sociales et économiques s’aggravent, minées par une dette colossale et des appels à la mobilisation dès la rentrée, une question s’impose : assiste-t-on aux prémices de l’effondrement de la Ve République ? Seul l’avenir nous le dira.