Le nom des Émirats arabes unis revient fréquemment dans le cadre de la guerre qui sévit au Soudan. Le pays est accusé de fournir un soutien militaire et logistique aux milices du Rapid Support Forces (RSF), impliquées dans des massacres dans plusieurs régions du Soudan, notamment à El-Fasher, où des rivières de sang ont été observées depuis l’espace, selon l’ONU.
Les accusations contre les Émirats ne se limitent pas à l’armée ou au gouvernement soudanais, ni aux organisations de défense des droits humains. Elles ont été relayées par les plus grands médias internationaux et ont atteint la rue : des manifestations contre les Émirats, accusés de fomenter la guerre au Soudan, ont eu lieu, comme ce fut le cas récemment à Bruxelles, devant l’ambassade d’Abou Dhabi.
Des centaines de personnes ont manifesté devant l’ambassade des Émirats à Bruxelles, dénonçant ce qu’elles considèrent comme une complicité émiratie dans les violences commises par les RSF. Les manifestants affirment que les Émirats soutiennent les RSF pour des raisons économiques.
Selon les organisateurs, environ 600 personnes ont participé à la manifestation et ont appelé à un boycott économique des Émirats, rapporte le site belge VRT.
Un manifestant a déclaré aux journalistes, sous couvert d’anonymat pour protéger sa famille encore au Soudan : « Les Émirats arabes unis sont complices du génocide qui se déroule au Soudan. »
Les manifestants dénoncent également ce qu’ils appellent la « position hypocrite » de la Belgique et de l’Union européenne. Selon eux, les RSF recevraient des armes belges via les Émirats, et ils demandent à la Belgique et à l’Europe de condamner clairement la violence. Ils estiment que l’UE doit agir de manière responsable et ne pas alimenter « cette guerre par procuration », en stoppant toutes les livraisons d’armes aux pays qui approvisionnent les RSF.
Le hashtag #BoycottUAE a récemment dominé les réseaux sociaux, dans le cadre d’une campagne mondiale demandant de tenir Abou Dhabi responsable de ce que les activistes considèrent comme son implication directe dans l’escalade des conflits régionaux et le financement du génocide en cours à El-Fasher.
Les experts soulignent que la situation dépasse le cadre des « divergences politiques » : il s’agit d’une stratégie de déstabilisation qui prétend instaurer la paix tout en finançant des guerres.
Des preuves accablantes
Des enquêtes journalistiques ont révélé l’implication directe des Émirats dans le conflit, en fournissant un soutien militaire, logistique et médiatique aux RSF. Le Sunday Times a publié un rapport détaillant le rôle des Émirats dans l’escalade des atrocités au Soudan, confirmant des enquêtes antérieures de l’ONU liant le trafic d’armes et d’or émirati aux RSF, milice largement accusée de crimes de guerre au Darfour.
Malgré les démentis répétés d’Abou Dhabi, les preuves indiquent que les Émirats ont fourni armes, financements et soutien logistique aux RSF, en violation du droit international, exacerbant un conflit par procuration qui détruit la vie des civils dans tout le Soudan.
Le Wall Street Journal rapporte que les Émirats ont envoyé des livraisons croissantes d’armes, y compris des drones chinois avancés, aux RSF ces derniers mois. Des rapports des agences de renseignement américaines signalent une augmentation significative du flux d’équipements militaires depuis le printemps, provoquant une large inquiétude à Washington, qui tentait de contenir l’escalade du conflit soudanais.
Lors de la dernière session d’urgence du Conseil de sécurité sur la situation à El-Fasher, la capitale du Nord-Darfour, un échange tendu a eu lieu entre l’ambassadeur soudanais Harith Idriss et son homologue émirati Mohammed Abu Shahab.
L’ambassadeur soudanais a présenté au Conseil des documents attestant l’implication des Émirats dans le soutien aux RSF, comprenant aide militaire, drones, munitions, recrutement de mercenaires et couverture médiatique. Il a exprimé sa consternation de voir l’ambassadeur émirati assis à la table du Conseil, alors que sa place devrait être auprès des milices.
Le ministre américain des Affaires étrangères a contacté son homologue émirati, Abdullah bin Zayed, pour appeler au soutien d’un cessez-le-feu au Soudan. La démarche fait suite aux avertissements du sénateur Rubio sur le flux d’armes vers le Soudan, signalant qu’il passerait par « un certain pays », sous-entendant les Émirats.
La couverture médiatique controversée
La chaîne émiratie Sky News Arabia fait face à de vives critiques pour avoir minimisé les atrocités au Darfour. Le Daily Telegraph britannique souligne la polémique après qu’une correspondante de la chaîne a été vue en train d’embrasser une commandante des RSF, connue pour avoir incité publiquement à des viols au Darfour.
Sky News Arabia a également diffusé un reportage d’un médecin niant l’existence de corps dans un hôpital saoudien où environ 470 personnes auraient été tuées. Des images satellites analysées par l’université de Yale montrent pourtant la dispersion de cadavres, des tirs et l’incinération de corps dans des fosses communes autour de la ville.
La journaliste Yusra Al-Baqir a dénoncé la couverture de Sky News Arabia comme de la propagande soutenant les RSF, reflétant l’influence du fonds médiatique émirati supervisé par le cheikh Mansour bin Zayed.
Le Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, Volker Türk, a qualifié la violence à El-Fasher de « honte pour la communauté internationale » et a averti tous les acteurs impliqués : « Nous vous surveillons et la justice prévaudra ».
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