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Que se passe-t-il en Libye ?

Un nouvel épisode de la crise aux issues totalement ouvertes

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La situation à Tripoli, en Libye, a récemment glissé vers une nouvelle phase de violence, aussi grave que celle survenue il y a quelques années, lorsque les milices du maréchal retraité Khalifa Haftar s’étaient approchées des abords de la capitale. Elles avaient alors été repoussées par les forces du Conseil présidentiel, soutenues par l’aviation turque, un appui justifié à l’époque par un accord de coopération sécuritaire entre les gouvernements libyen (reconnu par l’ONU) et turc.

Cependant, la situation actuelle diffère sur les plans militaire et politique. Cette fois, les tirs de roquettes et les armes lourdes ont résonné en plein centre de Tripoli, rappelant les scènes de chaos ayant suivi la chute de Kadhafi. Des manifestations ont ensuite éclaté dans plusieurs villes pour exiger une véritable construction de l’État national, et non un pays fragmenté entre deux gouvernements, des barrages militaires contrôlés par des hommes armés et un climat d’insécurité généralisé. Un communiqué du Haut Conseil d’État est venu envenimer les choses en déclarant la perte de légitimité du gouvernement Dbeibah, reconnu pourtant au niveau international, sans que ce dernier ne réagisse officiellement.

Ces développements s’inscrivent dans un contexte international tendu, marqué par des transformations géopolitiques majeures, notamment dans les zones de conflits où certaines puissances étrangères s’efforcent de diviser les pays, affaiblir leurs structures et installer des régimes qui leur sont favorables.

Dans ce climat, le Conseil présidentiel a exigé un cessez-le-feu total et immédiat, et ordonné à toutes les unités militaires de regagner leurs casernes sans conditions. Il a aussi gelé toute décision militaire ou sécuritaire prise par le gouvernement d’unité nationale, notamment celles concernant la réorganisation des structures sécuritaires ou la nomination de nouveaux responsables.

Cette décision est intervenue après une déclaration du ministère de la Défense du gouvernement d’unité, annonçant avoir repris le contrôle total de la zone d’Abou Salim, au sud de Tripoli, où des affrontements violents avaient éclaté. Le ministère a affirmé que l’opération avait « pris fin avec succès » et visait à garantir la stabilité sécuritaire.

Des manifestations ont parallèlement eu lieu à Tripoli, Misrata et ailleurs, interprétées par l’opposition comme un rejet populaire du pouvoir en place, tandis que Moussa Al-Koni, membre du Conseil présidentiel, les a qualifiées de « légitimes » et a exhorté à ne pas permettre à des fauteurs de troubles de les détourner de leur objectif, appelant les forces de sécurité à protéger les manifestants et les biens publics et privés.

Ces divergences montrent que la Libye reste profondément divisée entre un gouvernement reconnu sur le plan international et un Conseil présidentiel d’une part et les forces de Khalifa Haftar, soutenues par des puissances étrangères qui cherchent soit à imposer leur vision, soit à maintenir le pays dans un état de fragmentation et d’instabilité, d’autre part.

Face à cela, les manifestants réclament la fin de l’insécurité, des élections indépendantes, le désarmement des groupes armés, et l’instauration d’un monopole d’État sur la force militaire.