Les partisans de Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur français et président du parti Les Républicains, font pression pour imposer une nouvelle équation dans les relations entre l’Algérie et la France. Cette approche vise, entre autres, à promouvoir un récit qui met sur un pied d’égalité les bourreaux et les victimes, tout en niant aux Algériens le droit légitime de dénoncer les crimes de l’occupation, perpétrés durant les 132 années de colonisation.
Dans ce cadre, la sénatrice Valérie Boyer, proche de Retailleau, a proposé une résolution parlementaire intitulée « Pour une réconciliation consciente et équilibrée entre la France et l’Algérie ». Elle y appelle le gouvernement français à officialiser la commémoration du 5 juillet en hommage aux victimes européennes des événements dramatiques d’Oran (une période de chaos sécuritaire survenue dans cette ville clé, liée à l’action de l’Organisation de l’armée secrète – OAS), coïncidant avec les célébrations de l’indépendance de l’Algérie.
Le choix du 5 juillet, date hautement symbolique pour les Algériens – jour de l’indépendance –, n’est bien sûr pas anodin. C’est une tentative de relativiser cette journée de libération en la faisant coïncider avec la mémoire d’un épisode douloureux où, selon certaines estimations, environ 700 Européens et des dizaines d’Algériens ont trouvé la mort.
Dans sa résolution, Valérie Boyer – connue pour ses positions hostiles et provocatrices à l’égard des intérêts algériens (notamment pour avoir accueilli une délégation du mouvement séparatiste MAK au Sénat) – propose d’inviter des parlementaires algériens à ces cérémonies.
Parmi les points évoqués dans cette résolution figure également une demande explosive concernant les biens des Français en Algérie. Boyer y appelle le gouvernement français à présenter un rapport sur les dossiers traités par le groupe de travail franco-algérien chargé des droits de propriété des Français après l’indépendance de l’Algérie.
Elle enveloppe ces revendications dans un discours plus large afin de dissimuler ses motivations réelles, en appelant à rendre publics les résultats des travaux de la commission mixte d’historiens français et algériens, censée faire la lumière sur la présence (et non pas la colonisation, selon ses termes) française en Algérie. Elle note que les conclusions ou recommandations de cette commission n'ont jamais été rendues publiques.
La résolution se termine par une exigence de libération immédiate et sans condition de Boualem Sansal, ainsi que par une demande que l’Algérie retire les mandats d’arrêt internationaux contre Kamel Daoud.
L’exposé des motifs annexé au texte de la résolution révèle la pensée du nouveau colonialisme français : un récit idéalisé des presque deux siècles de relations complexes entre les deux pays, teinté de nostalgie impériale et d’un discours civilisateur qui flirte avec les théories de supériorité raciale.
Valérie Boyer tente d’imposer une lecture "humanisante" du passé colonial français, affirmant que la colonisation de l’Algérie par la France en 1830 n’était pas une colonisation au sens classique, prétendant que la France n’avait pas l’intention d’exterminer la population (passée, selon elle, de 2,3 millions à 9 millions d’habitants en 1962), et que le principal objectif était de renforcer l’influence française après les défaites subies durant les guerres révolutionnaires et napoléoniennes.
Elle affirme également que l’Algérie, à l’époque, faisait partie de l’Empire ottoman (reprenant ainsi les positions d’Emmanuel Macron et de Boualem Sansal) et qu’elle était un bastion de piraterie maritime et d’esclavage d’Européens. Elle prétend aussi qu’en 1962, lors du départ de la France, l’Algérie était le pays le plus moderne d’Afrique en matière d’infrastructures et d’éducation.
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