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Lutte contre les commerçants « fictifs »

Le ministère du Commerce a annoncé que l’évaluation sectorielle a révélé l’existence de pratiques non réglementées, ainsi que d’autres ayant porté atteinte au pouvoir d’achat des citoyens

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Le gouvernement a décidé de lancer une offensive contre les commerçants « fictifs » qui commercialisent leurs produits, que ce soit en boutique ou en ligne, et qui opèrent via diverses pages sur les réseaux sociaux sous le nom « d’influenceurs » ou « créateurs de contenu », dans différents domaines dans le but de générer des profits. Les agents de contrôle ont été mobilisés pour les obliger à régulariser leur situation et les soumettre aux différents impôts et taxes.

Un arrêté interministériel daté du 30 mars 2025, publié dans le dernier numéro du Journal officiel, fixe les critères et modalités d’évaluation du caractère habituel et répétitif des transactions de toute nature réalisées par des particuliers dans un but lucratif, soumises aux différents impôts et taxes.

Cet arrêté s’inscrit dans le cadre de l'application de l'article 115 de la loi n°16-21 du 30 décembre 2021, portant loi de finances pour 2022. Il vise à définir les critères permettant de qualifier une activité comme habituelle et répétée, dès lors qu’elle est exercée à des fins de profit et entre dans le champ de l’imposition.

Les dispositions de l’arrêté s’appliquent aux transactions de toute nature, si celles-ci sont exercées de manière habituelle et répétée, ou poursuivent un but lucratif, ou encore si elles atteignent au moins trois opérations au cours de la même année civile, ou relèvent du commerce selon les termes du code de commerce.

L’arrêté précise aussi que, sans préjudice des dispositions légales et réglementaires en vigueur, ses dispositions s’appliquent aux individus ne disposant pas d’un document leur permettant d’exercer une activité commerciale, mais qui effectuent régulièrement des transactions de toute nature. Les agents de l’administration fiscale sont ainsi chargés d’évaluer le caractère habituel et répétitif de ces activités à l’aide de tous les moyens de contrôle prévus par la législation fiscale.

Si ces transactions sont effectivement constatées, les agents fiscaux adressent une mise en demeure aux personnes concernées selon le modèle en vigueur pour leur permettre de régulariser leur situation. Si aucune suite n’est donnée après une première mise en demeure, une seconde est envoyée. En cas de non-conformité après les deux avertissements, un procès-verbal est établi par les agents fiscaux.

Le même document précise que dans les cas où plus de trois transactions sont prouvées, un procès-verbal peut être établi sans avertissement préalable. Ces documents sont ensuite transmis aux services régionaux compétents du ministère du Commerce dans un délai de 30 jours à compter de leur rédaction. Les personnes concernées sont ainsi soumises aux droits et taxes prévus par la législation en vigueur.

Le ministère du Commerce avait déjà indiqué que l’évaluation sectorielle a révélé l’existence de pratiques non encadrées, ayant porté atteinte au pouvoir d’achat des citoyens à travers des méthodes frauduleuses. Il faisait référence à l’e-commerce, qui a connu un essor important ces dernières années, sans que les opérateurs ne soient assujettis aux lois en vigueur, bien qu’ils exercent des activités lucratives leur procurant des revenus réguliers ou périodiques.

Par conséquent, la structure du ministère du Commerce a été revue, avec la création de deux nouvelles sous-directions : l’une dédiée à la régulation et au cadrage du commerce électronique, et l’autre chargée de contrôler cette activité, qui n’était pas auparavant prise en charge.

La même situation s’applique à l’activité des « influenceurs » sur les réseaux sociaux, laquelle s’est largement éloignée de ses objectifs initiaux — éducatifs, culturels, scientifiques, voire artistiques ou ludiques — pour se transformer en plateformes diffusant des vidéos et des informations erronées, voire des contenus appelant à la débauche, à des comportements immoraux ou incitant à la violence et à la consommation de drogues.

Des députés de l’Assemblée populaire nationale ont adressé une correspondance proposant l’élaboration d’un projet de loi visant à encadrer l’activité des « influenceurs », afin de mettre en place un cadre juridique strict garantissant l’ordre public et protégeant la société contre toute utilisation abusive des plateformes numériques gérées par ces derniers. L’objectif est de veiller à ce que leur contenu soit conforme aux lois et aux valeurs nationales et de mettre fin au désordre régnant dans ce secteur, surtout face à l’influence croissante du numérique sur l’opinion publique.

Le projet prévoit également l’intégration des influenceurs dans le système fiscal national, leur permettant ainsi de contribuer de manière « équitable » au financement du Trésor public. Cela traduit une volonté d’instaurer une justice fiscale à l’instar des autres acteurs économiques. Parmi les points importants du projet figure aussi la mise en place de mécanismes de contrôle des activités numériques des influenceurs, pour éviter tout usage de ces plateformes à des fins de diffusion de contenus trompeurs, illégaux ou à des fins malveillantes visant à nuire à la stabilité du pays ou à l’ordre public.