Société

Le retrait de nationalité concerne des cas tout à fait exceptionnels

Le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Lotfi Boudjemaa, s’exprime à propos du projet de proposition de modification du Code de la nationalité

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Le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Lotfi Boudjemaa, a insisté hier sur le caractère exceptionnel du projet de modification du Code de la nationalité, affirmant que le texte concerne des cas tout à fait exceptionnels, notamment la haute trahison, ainsi que les atteintes à l’unité nationale, en particulier dans un contexte où certains détenteurs d’une seconde nationalité acquise chercheraient à porter atteinte à leur nationalité algérienne d’origine.

Cette déclaration a été faite lors de la participation du ministre de la Justice à une réunion de la commission des affaires juridiques, administratives et des libertés de l’Assemblée populaire nationale, consacrée à l’audition du député Hichem Sifer, auteur de la proposition de loi.

Selon le texte de la proposition, peut être déchu de la nationalité algérienne d’origine tout Algérien résidant à l’étranger qui se livre à des actes portant atteinte aux intérêts de l’État ou à son unité nationale, notamment tout comportement susceptible de causer un préjudice grave aux intérêts de l’État algérien, toute tentative d’atteinte à l’unité nationale, ainsi que toute manifestation de loyauté envers un État étranger, sous quelque forme d’expression que ce soit, assortie d’une insistance à renier la loyauté envers l’État algérien.

L’article 22 du projet de loi stipule que toute personne ayant acquis la nationalité algérienne peut en être déchue si elle fait l’objet d’une condamnation pour un acte qualifié de crime ou de délit portant atteinte aux intérêts vitaux de l’Algérie ou à l’unité nationale, ou si elle a été condamnée en Algérie ou à l’étranger pour un crime passible d’une peine égale ou supérieure à cinq années d’emprisonnement.

La déchéance ne peut être prononcée que si les faits reprochés à la personne concernée ont été commis dans un délai de dix ans à compter de la date d’acquisition de la nationalité algérienne, et elle ne peut être déclarée que dans un délai de cinq ans à compter de la date de commission de ces faits.

Peut également être déchu de la nationalité algérienne, qu’elle soit d’origine ou acquise, tout Algérien ayant agi, hors du territoire national, d’une manière susceptible de porter atteinte aux intérêts de l’État algérien ou à l’unité nationale, ou ayant manifesté l’intention de nuire à l’État algérien, ou ayant clairement exprimé sa détermination à renier sa loyauté envers l’État algérien, ou encore ayant rendu des services à un autre État ou accepté des fonds ou avantages de sa part dans le but de porter atteinte aux intérêts de l’État algérien, et ce, en persistant dans ces actes malgré une mise en demeure des autorités algériennes.

Sont également concernés les cas de collaboration avec des entités militaires ou sécuritaires étrangères, ou l’apport d’une assistance à celles-ci, au détriment des intérêts de l’État algérien, avec maintien de ces actes malgré un avertissement émanant du gouvernement algérien, ainsi que toute relation avec un État ou une entité hostile à l’État algérien.

Est également visée toute personne ayant exercé des activités au sein d’un groupe ou d’une organisation terroriste ou subversive à l’étranger, quelle que soit sa forme ou sa dénomination, ou ayant contribué à son financement, assuré sa propagande ou y ayant adhéré, au détriment des intérêts de l’État algérien.

Le projet de loi prévoit par ailleurs la possibilité de récupérer la nationalité algérienne d’origine pour toute personne qui en a été déchue, sur sa demande, au moins vingt-quatre mois après la date de la déchéance, par décret présidentiel.

Le mécanisme de déchéance ou de retrait de la nationalité algérienne est, par principe, soumis à des dispositions strictes prévues par la loi et la Constitution, notamment en ce qui concerne la nationalité acquise. Le législateur a en effet limité ces cas à des situations précises, telles que les crimes d’espionnage, de trahison, de terrorisme, la collaboration avec des services de sécurité étrangers, ou l’obtention de la nationalité par des manœuvres frauduleuses, sans étendre ces dispositions aux Algériens titulaires de la nationalité d’origine.

Ces questions requièrent un haut degré de discernement et de responsabilité, car elles touchent au cœur même de l’appartenance nationale. Elles ont suscité des inquiétudes chez certains défenseurs des droits, mais le ministre a cherché, par ces explications, à dissiper toute interprétation pouvant considérer le projet comme arbitraire ou ciblant une catégorie spécifique, affirmant qu’il s’agit d’une mesure juridique exceptionnelle imposée par des considérations exclusivement souveraines.

Le texte proposé reflète une orientation législative défensive, visant à renforcer la protection de l’État dans un contexte régional et international marqué par la complexité des menaces et l’entrelacement des appartenances. Ainsi, selon ses auteurs, le projet opère un équilibre entre la protection des droits liés à la nationalité, d’une part, et la sauvegarde de la sécurité nationale et de l’unité nationale, d’autre part, en tant qu’outil préventif et non comme un moyen d’exclusion, traduisant la vision de l’État quant au rôle du droit dans la préservation de la stabilité et de l’identité nationale.