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La Cour constitutionnelle tranche sur la "plainte" de l’opposition parlementaire

L’instance judiciaire a fourni plusieurs justifications concernant sa position sur l’avis

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La Cour constitutionnelle a publié, hier, son avis concernant une notification introduite par 45 députés ayant dénoncé ce qu’ils ont qualifié d’"abus" au sein de l’Assemblée populaire nationale, en lien avec la non-application de l’article 116 de la Constitution, garantissant les droits de l’opposition parlementaire.

Selon un communiqué publié au Journal officiel, la Cour a indiqué qu’après une étude approfondie du contenu de la demande d’interprétation, elle est parvenue à la conclusion que les formulations contenues dans la notification concernent essentiellement les modalités d’application des dispositions de l’article 116, et non l’interprétation de l’article lui-même, lequel reconnaît un ensemble de droits à l’opposition dans le cadre de l’activité parlementaire.

L’instance judiciaire a précisé que l’article constitutionnel renvoie à l’autorité réglementaire dont dispose chaque chambre du Parlement pour ce qui est des modalités d’application de son contenu.

À l’issue d’une audience tenue le 19 juin dernier, la Cour a estimé que seuls les membres du Parlement sont habilités à clarifier et définir les modalités d’application de l’article 116, objet de la demande d’interprétation — et non la Cour constitutionnelle elle-même.

Par conséquent, la Cour conclut que les différentes sections de l’article 116 sont claires, ce qui les rend directement applicables sans ambiguïté ni contradiction. Elle a ajouté que les auteurs de la notification n’ont signalé aucun élément ambigu ou sujet à interprétation multiple, soulignant que leur démarche portait davantage sur des pratiques observées que sur le texte juridique en soi.

La Cour a aussi motivé son avis en indiquant que les députés ont dévié du cadre de la demande d’interprétation, en posant à la Cour des questions directes ne relevant pas de sa compétence. Elle a noté que la lecture de leur requête révèle une vision stéréotypée des tensions naturelles entre majorité et opposition parlementaire, lesquelles, selon eux, affaiblissent le contrôle parlementaire et vident l’article 116 de sa substance.

Un groupe de députés de l’Assemblée populaire nationale avait adressé, le 20 juin dernier, une notification à la Cour constitutionnelle concernant la "mauvaise application" de l’article 116 de la Constitution de 2020, qui consacre les droits de l’opposition parlementaire.

Leur porte-parole a évoqué une violation de l’article qui garantit la participation effective à la vie parlementaire et politique, notamment la liberté d’expression, de réunion, le droit à un financement selon la représentation au Parlement, la participation aux travaux législatifs, le contrôle de l’action gouvernementale, et la représentation équitable dans les instances parlementaires, y compris la présidence tournante des commissions.

Les députés estiment que l’interprétation restrictive et la mauvaise application de l’article 116 ont conduit à la marginalisation du rôle de l’opposition, à une rupture de l’équilibre entre les pouvoirs, et à des abus de pouvoir de la part de la majorité siégeant au bureau de l’Assemblée.

La notification, déposée le 4 juin, fait état de plusieurs griefs, parmi lesquels, atteinte à la liberté d’expression et de réunion de l’opposition, interventions de certains ministres pour limiter la liberté d’expression des députés, publication des réponses gouvernementales dans les médias plutôt qu’au sein du Parlement, refus de diffusion des interventions des députés de l’opposition, blocage de leur participation législative et de contrôle.
Ils dénoncent aussi, le refus du bureau de l’Assemblée de transmettre les amendements de l’opposition aux commissions compétentes, l’usurpation par le bureau de la compétence d’évaluer le fond des propositions au lieu de leur forme (en violation des articles 14 et 61 du règlement intérieur).
Les députés parlent également de multiples cas d’exclusion, notamment la marginalisation des initiatives parlementaires de l’opposition (propositions de loi, commissions d’enquête, interpellations), l’exclusion de la diplomatie parlementaire,
le refus injustifié de leur participation à des missions officielles, leur exclusion de la représentation internationale sans fondement légal.
Ils dénoncent surtout le blocage de la mise en œuvre du dernier alinéa de l’article 116, qui, selon eux, est entravée par l’usage du règlement intérieur comme outil d’obstruction plutôt que d’organisation.

Les députés se sont interrogés sur les garanties juridiques et institutionnelles réelles assurées par l’article 116 pour permettre la participation de l’opposition à l’action législative, l’existence éventuelle de restrictions implicites ou non formulées dans le texte constitutionnel.
Ils cherchent également à connaître les mécanismes constitutionnels et judiciaires disponibles pour faire respecter les textes constitutionnels, comme les recours juridiques ouverts aux députés en cas d’abus ou de retard délibéré dans l’application de l’article 116, les moyens d’action en cas de refus des institutions concernées de répondre sérieusement à leurs obligations constitutionnelles.
Enfin, ils s’inquiètent des décisions du bureau de l’Assemblée concernant le respect des initiatives parlementaires de l’opposition (commissions d’enquête, propositions de lois, interpellations), les modalités d’intégration de ces initiatives dans l’agenda parlementaire, sans les conditionner à des révisions internes dictées par une majorité dont l’opposition ne dispose pas.