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Les doutes de Rahabi sur le "deal" autour Sahara occidental

« Il est difficile de croire que les problèmes de notre région puissent être résolus sur le modèle du Moyen-Orient, c’est-à-dire à travers des équilibres fragiles, des promesses financières, des négociations diplomatiques et des déclarations tapageuses. »

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L’ancien ministre et diplomate Abdelaziz Rahabi a livré, jeudi, une analyse succincte au sujet du règlement potentielle évoquée récemment, par Steve Witkoff, conseiller du président américain et son envoyé spécial pour le Moyen-Orient, qui a fixé un délai de deux mois pour parvenir à un règlement.

Dans une publication sur sa page Facebook intitulée « Le Sahara occidental et la diplomatie des deals à la Trump », Rahabi a qualifié cette initiative – « difficile à définir » – de « singulière », soulignant que l’Algérie n’a pas officiellement pris part à ce qu’il considère comme une suractivité diplomatique du président Trump, fondée sur la logique des transactions.

Ce qui semble être un rapprochement entre l’Algérie et le Maroc, poursuit l’ancien ministre de la Communication, n’est en réalité qu’une opération d’influence coordonnée entre les États-Unis, la France et le Royaume-Uni au sein du Conseil de sécurité, devenu, selon lui, un instrument servant à consolider leurs positions, notamment sur la question du Sahara occidental.

Rahabi estime que ces trois puissances ont proposé un texte de résolution permettant au Conseil de transférer la souveraineté sahraouie à la puissance occupante, en le présentant comme un gage de normalisation entre l’Algérie et le Maroc.
Dans son analyse politique, il relie ces dynamiques à une logique néocoloniale, et dénonce une manœuvre visant à présenter faussement l’Algérie comme partie prenante dans un processus où elle n’a aucun intérêt, sinon celui d’apparaître soumise à des pressions extérieures.

Le diplomate ajoute que Paris, « cerveau politique et financier du plan d’autonomie marocain », œuvre actuellement à le reformuler pour le rendre comparable au modèle de la Nouvelle-Calédonie, où un référendum populaire détermine le choix entre indépendance et autonomie dans le cadre de la souveraineté française.

Quant aux Britanniques, qui ont longtemps défendu le droit à l’autodétermination, Rahabi estime qu’ils sont « prisonniers de leur propre histoire », ce qui les conduit, comme la Russie récemment, à considérer qu’une large autonomie pourrait constituer une forme d’expression du droit à l’autodétermination.

Il rappelle, à ce propos, que le concept d’« autonomie élargie » a refait surface récemment, à la suite de déclarations concernant le document présenté par le Front Polisario au Conseil de sécurité, avant la séance consacrée au vote d’un projet de résolution sur le Sahara occidental, exprimant sa disposition à engager des négociations directes avec le Maroc, qualifié de puissance occupante.

Rahabi cite également l’exemple de Gibraltar, « territoire historiquement espagnol inscrit depuis 1946 sur la liste des territoires non autonomes des Nations unies », qui, selon lui, devrait légitimement bénéficier de ce changement dans la doctrine diplomatique britannique.

Il ajoute que les États-Unis ont cette fois déployé tous leurs efforts pour présenter la question sahraouie comme un conflit algéro-marocain et pour conférer une légitimité à l’occupation du Sahara occidental.
Washington chercherait ainsi à stabiliser son allié marocain, allant jusqu’à envisager d’offrir au Front Polisario une autonomie élargie ou même une partie de ses territoires historiques, sans consultation du peuple sahraoui.

Rahabi attribue cette initiative américaine à l’inquiétude croissante de Washington face à la montée de la présence russe et chinoise multiforme en Afrique.
Ne pouvant compter sur les moyens limités de ses alliés africains sur la façade atlantique, les États-Unis chercheraient à renforcer leur présence dans la région du Sahel, vaste zone en proie à l’anarchie, aux troubles et à une menace terroriste persistante.

Enfin, Rahabi juge irréaliste d’espérer résoudre les problèmes de l’Afrique du Nord selon les mêmes approches que celles appliquées au Moyen-Orient, déclarant :

« Il est difficile de croire que les problèmes de notre région seront réglés sur le modèle du Moyen-Orient — avec des équilibres précaires, des promesses financières, des annonces diplomatiques et des déclarations ronflantes — sans négociations directes et inconditionnelles, sous l’égide des Nations unies, entre le Polisario et le Maroc. »

Et de conclure : selon lui, aucune solution juste, durable et définitive à la question sahraouie ne saurait émerger de telles conceptions.