Economie

Naâma: de porte du Sahara à pôle économique

Les efforts des hautes autorités, visant à avancer de manière sérieuse vers la sécurité alimentaire en rompant avec la dépendance à la rente pétrolière, s’inscrivent dans la volonté de faire de l’agriculture une alternative stratégique pour la création de richesse

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L’atmosphère qui se dessine dans la wilaya de Naâma, située à environ 700 km au sud-ouest du pays, indique que la région connaît une mutation économique notable, après avoir commencé à briser l’image stéréotypée qui l’a longtemps caractérisée, durant près d’un demi-siècle, en tant que wilaya pastorale saharienne. Elle s’oriente désormais vers un modèle de création de richesse, s’affirmant comme l’une des destinations prometteuses dans la construction de la sécurité alimentaire, et apportant ainsi une valeur ajoutée à l’économie nationale, au regard des potentialités naturelles dont elle dispose.

Les dispositions actuellement en cours montrent que de grandes entreprises publiques et étrangères, ainsi que d’importants investisseurs algériens et étrangers, s’apprêtent à s’implanter à Naâma. Cette dynamique sera renforcée par la réalisation d’une usine de transformation du minerai de fer et d’une autre dédiée à la transformation du papier, parallèlement aux préparatifs visant la mise en place d’une industrie agroalimentaire de transformation. La région recèle également de forts atouts touristiques qui en font un musée naturel à ciel ouvert, en raison de ses ksour, de ses sites religieux, de ses lacs classés et de ses montagnes, ce qui nécessite une promotion soutenue afin de l’ériger en destination touristique du Sud-Ouest du pays.

Les terres agricoles de la wilaya de Naâma couvrent plus de deux millions d’hectares. Toutefois, la production végétale ne représente que 4 % de la valeur financière de la production agricole, tandis que la production animale contribue à hauteur de 74 % de la valeur globale, avec un cheptel dépassant un million deux cent mille têtes.

Le forum, un tournant décisif

Les efforts des hautes autorités visant à avancer de manière sérieuse vers la sécurité alimentaire en brisant la syndrome de la rente pétrolière, s’orientent vers la promotion de l’agriculture comme alternative stratégique de création de richesse, dans le but de sortir la région de l’apathie et de l’immobilisme, à travers un plan de développement de l’agriculture saharienne couvrant 20 wilayas, incluant le reboisement des terres, l’extension des surfaces cultivables et le soutien aux agriculteurs et aux investisseurs.

Le Forum national pour le développement des cultures stratégiques, qui s’est tenu en 2023 dans la wilaya de Naâma, a constitué un tournant majeur dans le lancement de la région vers le secteur agricole.

Selon le directeur des services agricoles de Naâma, Boujemaa Cherouine « immédiatement après le Forum national, organisé sous le slogan : “Naâma : perspectives prometteuses pour le développement des cultures stratégiques et la valorisation des races locales”, sous le haut patronage du Président de la République et la supervision du Ministère de l’Intérieur et des Collectivités locales ainsi que du Ministère de l’Agriculture et du Développement rural, auquel ont participé 7 ministres, des opérateurs et des investisseurs agricoles locaux et étrangers, plus de 80 000 hectares de terres ont été identifiés sous forme de périmètres destinés à attirer des projets à dimension stratégique, tels que les céréales, le maïs, les cultures fourragères, les cultures oléagineuses, la pomme de terre saisonnière et non saisonnière, ainsi que la production de viande… »

Dans le cadre du décret exécutif 21/432 daté du 4 novembre 2021, plus de 37 200 hectares ont été distribués après avoir été successivement mis sur la plateforme numérique de l’Office national des terres agricoles, ajoute le directeur.

Parmi ces superficies, plus de 3 200 hectares ont été attribués à la culture de la pomme de terre. Les services de la wilaya veillent à sélectionner les investisseurs dans ce périmètre agricole et privilégient les entreprises agréées par le Ministère de l’Agriculture pour la production de semences de pomme de terre.

Modèles d’investissements

Lors de sa visite à Naâma, El Khabar a pu constater plusieurs modèles d’investissements, révélant la continuité de l’afflux des investisseurs vers Naâma. Après un déplacement à la ferme SARL Tiout, située à 15 km de la commune de Tiout et à 100 km au sud de la ville de Naâma, nous avons observé les travaux en cours sur une vaste superficie de 1 150 hectares. Malgré les chutes de neige, environ six bulldozers étaient en train de préparer les parcelles pour accueillir les cultures stratégiques.

« Nous sommes venus de la capitale »

Zakaria Boukhari, ingénieur agricole à la ferme, déclare « nous sommes venus de la capitale pour investir à Naâma. Notre ferme SARL Tiout s’étend sur 1 150 hectares. Nous prévoyons de commencer ce mois de décembre les cultures stratégiques comme le blé, l’orge, la pomme de terre… ainsi que l’élevage des moutons. À l’avenir, nous espérons investir également dans les cultures industrielles. »

En réponse à la question : Qu’est-ce qui vous a encouragé à choisir la wilaya de Naâma pour investir dans l’agriculture ?, il répond « Naâma offre des perspectives prometteuses pour l’agriculture, grâce à la fertilité de ses sols, la qualité de ses eaux et un climat favorable. »

La qualité du matériel disponible à SARL Tiout montre le sérieux de l’investisseur dans la réalisation de son projet agricole : deux axes d’irrigation couvrant 30 hectares chacun, un troisième axe de 15 hectares, quatre transformateurs électriques, quatre puits et deux grands réservoirs d’eau, plusieurs tracteurs et bulldozers.

À Zebouja, à environ 10 km de la commune de Tiout sur la Route nationale 76 en direction d’El Bayadh, se trouve la ferme  Le Hoggar, qui s’étend sur 800 hectares. Abdelali, le gestionnaire de la ferme, considère l’avenir du projet comme prometteur «  nous nous concentrons sur les cultures stratégiques : blé, orge, en plus de la pomme de terre et des fourrages comme le sorgho et élevage des moutons », ajoutant avoir « dédié 20 hectares pour l’olive, 20 hectares pour la pomme de terre, 20 hectares pour les fourrages ; nous prévoyons d’augmenter le nombre de têtes de bétail et les surfaces consacrées aux cultures stratégiques : le blé et l’orge fourragère », en plus de la disponibilité de 5 puits, 2 réservoirs d’eau et des générateurs électriques.

Ces investissements reflètent le sérieux des investisseurs dans la mise en œuvre des cahiers des charges avec les services agricoles. L’utilisation de nouvelles technologies, comme la plateforme électronique d’investissement, a permis d’attirer des investissements sérieux, contrairement aux années précédentes où la distribution des terres agricoles se faisait selon la quantité plutôt que la qualité.

Redynamisation d’El Kasdir

Sur les 37 200 hectares distribués, 23 700 hectares se trouvent dans la zone frontalière d’El Kasdir (commune d’El Kasdir), répartis dans les périmètres de Oued Harmel, Bassin 70 et Rachdia, destinés aux cultures stratégiques et à la pomme de terre.

Cette orientation en faveur de l’investissement dans les zones frontalières montre que les autorités supérieures possèdent un plan de développement pour ces régions, basé sur une stratégie agricole visant : le renforcement de la sécurité alimentaire pour réduire la facture d’importation alimentaire, grâce à l’étendue et à la possibilité de mettre en valeur ces terres, la stabilisation des populations locales et la réduction de l’exode vers d’autres destinations en créant des emplois, la protection des frontières et le renforcement de la stabilité.

Ces investissements ont permis, selon les propos du wali, à Naâma de prendre la tête dans la production de céréales et de pommes de terre en l’espace d’un an et demi, avec un rendement estimé à 70 quintaux par hectare pour les céréales et 600 quintaux par hectare pour la filière de la pomme de terre hors saison. « Avec ce départ prometteur, nous pouvons fournir plus d’un million de quintaux par an comme point de départ… Ainsi, Naâma contribue de manière significative à l’économie nationale dans des domaines tels que les céréales, le maïs, les plantes oléagineuses, les fourrages, et le cheptel… ».

Ces zones frontalières, bien qu’elles aient été pourvues de tous les services nécessaires à la vie, y compris dans les zones reculées, étaient pendant des années exclues de projets générateurs de richesse et d’emplois, ce qui les rendait vulnérables aux problèmes sociaux.

Mais aujourd’hui, dans le sillage des transformations qui ont commencé à changer le visage des zones frontalières vers des perspectives futures prometteuses, certains habitants de la région que nous avons rencontrés n’ont pas caché leur appréciation pour les projets d’investissement, estimant qu’ils leur ont redonné espoir et ont ravivé leur enthousiasme pour la vie.

J’ai reçu toutes les incitations…

Lors d’un entretien avec le directeur des services agricoles dans son bureau, un investisseur agricole est entré. Il a obtenu une superficie de 1 000 hectares au sein d’un périmètre agricole de 20 000 hectares dans la zone frontalière de Ksadir, destiné aux cultures stratégiques et aux semences oléagineuses. Cet investisseur est le propriétaire d’une usine de chips dans la wilaya de Mila.

Interrogé sur les raisons de son choix pour investir dans la wilaya de Naâma, il a déclaré : « À Naâma, j’ai trouvé toutes les incitations, l’accueil et le soutien. En l’espace d’un mois et demi, j’ai obtenu la permission de creuser cinq puits à une profondeur de 350 m et nous sommes actuellement en train de réaliser une étude géologique de la superficie que nous avons acquise… », avant d’ajouter : « Nous espérons investir à l’avenir dans des chambres froides, puisque la wilaya se dirige vers une phase de développement de l’industrie de transformation. »

Le directeur des services agricoles confirme que le flux continu d’investisseurs s’explique par le fait que tous les services liés au secteur agricole dans la wilaya travaillent de manière coordonnée et harmonieuse sous la supervision du wali Lounas Bouzaza.

Réserve en eau de 33 millions m³

La disponibilité en eau, l’une des principales ressources de la wilaya, constitue un facteur clé pour attirer les investisseurs agricoles. La wilaya dispose d’une réserve en eau souterraine dépassant 33 millions de mètres cubes, reposant donc à 100 % sur les eaux souterraines, selon les propos du directeur de l’irrigation.

Pour le bassin de Naâma, les eaux souterraines atteignent 19 millions de mètres cubes par an, fournissant l’eau potable aux communes de Naâma et de Mecheria et approvisionnant les agriculteurs en eau d’irrigation. En général, les communes du nord-est de la wilaya dépendent des eaux souterraines situées dans le Chott Est et le Chott Ouest. Quant à la région sud, géographiquement rattachée à l’Atlas saharien, elle dépend entièrement des eaux souterraines, y compris Ain Sefra, où le volume extrait annuellement atteint 14 millions de mètres cubes.

Le nombre de permis de forage de puits a atteint 363 permis en 2025, contre 319 en 2024. En ajoutant les permis délivrés aux investisseurs sélectionnés via la plateforme électronique d’investissement, le total s’élève à 2 076 permis, ce qui reflète le sérieux des autorités dans l’accompagnement du secteur agricole et dans la promotion d’un bond en avant dans le développement.

26 000 hectares bientôt disponibles

Dans le sillage des transformations agricoles que connaît la wilaya depuis près de deux ans, le secteur de l’irrigation devrait également connaître un nouveau chapitre de développement pour accompagner les projets d’investissement agricole et industriel. Selon le directeur de l’irrigation, la wilaya mise sur l’exploitation des eaux du Chott Ouest pour approvisionner la population en eau potable et soutenir les investissements agricoles et industriels, surtout qu’un certain nombre d’investisseurs agricoles dans le domaine des cultures stratégiques ont obtenu jusqu’à 100 permis de forage de puits.

Les services agricoles ont également pris des dispositions pour étendre les superficies irriguées, actuellement stabilisées à 14 000 hectares, surtout que le wali Lounas Bouzaza, accompagné du directeur des services agricoles Boughamra Chrouine, annoncent la mise à disposition prochaine de 26 000 hectares sur la plateforme numérique. Ces superficies s’étendent sur les communes de la wilaya, portant la superficie exploitée à environ 63 000 hectares.

Parmi les 26 000 hectares proposés, 1 000 hectares ont été réservés aux jeunes porteurs de projets, après que les services de la wilaya ont préparé certains périmètres en ouvrant des pistes, en forant et équipant des puits, en construisant des bassins et en les dotant de canaux d’irrigation.

La stratégie de développement et de valorisation du secteur agricole et de l’irrigation à Naâma, selon le directeur des services agricoles, inclut l’utilisation des technologies, en intégrant le savoir et la numérisation dans le développement des projets du secteur. L’accord signé entre les services agricoles et l’Université Ahmed Salhi de Naâma (Maison de l’entrepreneuriat) illustre cette orientation. De plus, « le secteur agricole a bénéficié d’un accompagnement des écoles supérieures d’agriculture d’El Harrach sur deux années (2023-2024), sous forme de visites pédagogiques visant à développer les compétences des étudiants et à trouver des solutions aux problèmes rencontrés par les professionnels du secteur, certaines étant adoptées dans des mémoires de recherche. »

Grandes entreprises… en route

Il est notable que les autorités supérieures manifestent un intérêt pour la transformation agricole en cours depuis environ deux ans, au regard des premiers indicateurs prometteurs pour ce secteur. À titre d’exemple, la wilaya bénéficie désormais de huit (8) silos à céréales pour renforcer et développer les capacités de stockage, avec une capacité totale de 400 000 quintaux, contre 160 000 quintaux auparavant.

Cette attention laisse entrevoir l’avenir des grands investissements engagés par la wilaya de Naâma et ceux prévus à l’avenir. Le wali a précisé que la deuxième phase des investissements concerne de grandes superficies, allant de 10 000 à 20 000 hectares, qui seront attribuées à de grandes entreprises publiques, à des sociétés étrangères via le « couloir vert » prochainement, ainsi qu’à de grands investisseurs algériens et étrangers.

Bien que le wali ait refusé de divulguer les noms des entreprises nationales et étrangères ainsi que ceux des investisseurs algériens et étrangers, la visite de l’ambassadrice des États-Unis à Naâma, deux jours après notre retour à la capitale, laisse penser qu’il s’agit de démarches visant à explorer les opportunités d’investissement agricole dans la région.

En 2017, « El Khabar » a été l’un des premiers journaux à visiter la ferme américano-algérienne de Brizina dans la wilaya de Béchar (environ 700 km au sud-ouest de la capitale), s’étendant sur 20 000 hectares. D’après nos observations, elle constitue un modèle de grands investissements capables d’apporter une valeur ajoutée au secteur agricole et à l’économie nationale, compte tenu de la technologie utilisée et du domaine investi (cultures stratégiques et industrielles, pommes de terre, fourrages, et élevage).

Les investissements que réaliseront les grandes entreprises et investisseurs pourraient transformer Naâma et en faire l’un des principaux pôles de production et d’industrie alimentaire en Algérie, surtout que l’État continue de mobiliser davantage de moyens pour concrétiser ces investissements, notamment en matière d’électricité agricole, la wilaya disposant de certaines des plus grandes centrales électriques du pays, selon les propos du wali.

Le directeur des services agricoles confirme que, durant l’année 2025, plus de 200 km de réseau électrique agricole ont été réalisés, après qu’un budget de 100 milliards de dinars ait été alloué à ce domaine pour la première phase, ainsi que plus de 35 milliards de centimes pour l’ouverture des pistes. Il est prévu que le plan de raccordement des périmètres agricoles à l’électricité se poursuive dans le futur, suite à la préparation de la deuxième phase des grands investissements prochainement.

Priorité aux céréales, à la production de viande et de lait…

Selon le directeur des services agricoles, les cultures qui occuperont la priorité dans les futurs investissements sont les céréales en général, le maïs, les cultures fourragères, la production de viande et de lait, ainsi que la culture de la pomme de terre. Ces projets agricoles sont attendus pour insuffler un nouvel élan aux habitants de Naâma et les encourager à envisager l’avenir, surtout que le secteur attire un large public de la population locale, principalement des jeunes.

Dans le cadre de la stimulation et de l’encouragement de cette catégorie à s’impliquer dans l’avenir agricole de Naâma, les autorités de la wilaya, en collaboration avec les services agricoles, prévoient de mettre à disposition près de 1 000 hectares de terres agricoles pour les jeunes porteurs de projets, en particulier ceux ayant suivi une formation dans des centres et instituts de formation professionnelle.

Parallèlement aux préparatifs visant à provoquer une véritable avancée dans le domaine agricole, après un démarrage très prometteur ayant fait passer la superficie exploitée de 5 000 à 37 200 hectares, Naâma a pris la tête de la production de pommes de terre (600 quintaux par hectare) et de céréales (70 quintaux par hectare). Ces évolutions indiquent que la wilaya de Cheikh Bouamama se prépare à inaugurer une nouvelle étape dans l’élevage du bétail, étant donné qu’elle occupe les premières places en nombre de têtes de bétail avec 1 200 000 têtes, et que le caractère pastoral de la région occupe 74 % de la superficie totale de la wilaya.

1 200 000 têtes de bétail…

Lors de notre présence à Naâma, nous avons assisté à une réunion au siège de la wilaya regroupant plusieurs éleveurs et professionnels du secteur. La réunion portait sur la nouvelle stratégie visant à soutenir et développer le secteur de l’élevage et à renforcer la filière viande rouge, avec présentation des mesures incitatives mises en place par le ministère de l’Agriculture et de la Pêche, notamment le contrôle et la garantie continue des prix des fourrages. Cette approche s’inscrit dans la stratégie de sécurité alimentaire par le renforcement du cheptel et l’augmentation de la production locale, ainsi que dans l’organisation du marché, surtout pendant les périodes de forte demande comme le Ramadan et l’Aïd, et la promotion de l’amélioration des races via l’insémination artificielle, les centres techniques et la formation des éleveurs pour améliorer la qualité de l’élevage.

La situation actuelle de l’élevage à Naâma soulève la question de savoir s’il est possible de créer des opportunités d’investissement dans des unités de production de fourrage pour réduire les importations et signer des accords stratégiques avec des entreprises locales et étrangères afin de développer la production animale, incluant les unités de production de lait et de viande rouge, avec transfert de savoir-faire et technologie. Le plan pourrait également inclure la création d’un abattoir moderne accompagné d’un réseau de collecte et de conservation des peaux, pouvant aboutir à une tannerie puis évoluer vers une usine de chaussures, vêtements et sacs en cuir.

L’industrie de transformation : une nécessité

Selon les responsables locaux, les indicateurs positifs du secteur agricole favorisent et encouragent le lancement d’une industrie de transformation, compte tenu de la croissance de la production agricole. Actuellement, le ministère de l’Agriculture travaille à établir le lien avec le secteur industriel alimentaire, car transformer les produits agricoles (lait et dérivés, viande, pommes de terre, tomates, fruits, minoteries…) ajoute de la valeur à l’économie nationale et crée des emplois. Au lieu de vendre les produits agricoles sous leur forme brute, il est possible de créer des unités industrielles de transformation (unités de transformation de pommes de terre, jus, tomates, lait, yaourt…), améliorant la compétitivité du produit local et stimulant l’économie locale, contribuant ainsi à renforcer la sécurité alimentaire.

Le wali est convaincu que passer à l’industrie de transformation est inévitable, compte tenu des atouts de la wilaya et de la mise à disposition de 600 parcelles de terrain réparties dans six zones d’activités destinées à accueillir ces projets. Il déclare : « Nous nous dirigeons vers les industries de transformation. »

Obtention de la plus grande usine de transformation de minerai de fer

Ce tournant dans l’industrie de transformation est favorisé par l’implantation du grand projet de l’usine de transformation du minerai de fer, pour lequel 500 hectares ont été réservés dans la zone de Harchaya. L’usine produira du fer transformé et semi-transformé destiné à l’exploitation locale et à l’exportation, avec une capacité de 15 millions de tonnes par an, et devrait être alimentée par environ 80 000 m³ d’eau par jour provenant du Chott Est.

Selon le wali, ce projet devrait créer entre 5 000 et 10 000 emplois. Il contribuera également à dynamiser l’économie locale, la wilaya bénéficiant à l’avenir d’un projet de doublement de la ligne de chemin de fer pour compléter la ligne existante, après avoir profité du doublement de la route nationale n°06 reliant le nord au sud-ouest, ainsi que de la route nationale n°22 reliant Naâma à Tlemcen, en attendant l’extension future de l’aéroport Cheikh Bouamama situé à Mécheria.

L’implantation d’une usine de cette envergure à Naâma constitue un événement inédit pour l’ensemble du sud-ouest, portant un message politique : la peur se déplace des zones marquées par des dérives sociales vers une destination économique future pleine de vie et d’activité, représentant un maillon clé dans la diversification des ressources économiques et la sortie de la dépendance au pétrole.

Parallèlement, les travaux de l’une des plus grandes usines de transformation du papier sont en cours. La première phase prévoit la création de 1 500 emplois, avec un budget de 4 000 milliards de centimes.

Un musée ouvert sur la nature…

À Naâma, l’investissement agricole se conjugue avec les traditions pastorales et la puissance de la nature. Le visiteur découvrant la région de Tiout, à 100 km au sud de la ville de Naâma, est émerveillé par la beauté naturelle des oasis, vallées et roches gravées d’animaux variés.

Ahmed Agoun, chercheur sur l’histoire de Tiout, explique que la région est un véritable musée ouvert sur la nature, avec des empreintes de dinosaures, une forêt fossilisée et des stations de roches gravées datant du Néolithique, ainsi qu’un palais ancien de l’époque islamique entouré d’oasis. Cette oasis est classée dans le cadre de la convention de Ramsar sur la protection des zones humides, tandis que la station de roches gravées a été la première découverte mondiale en 1847 et est aujourd’hui classée patrimoine national.

La commune de Tiout possède un musée municipal regroupant des artefacts préhistoriques et un espace d’archives. La région est devenue une destination attirant des visiteurs de plusieurs wilayas, ainsi que des étrangers (Italiens, Français, Espagnols), et accueille chaque année le camp national de la jeunesse.

Lacs et montagnes

Le directeur du tourisme et des métiers traditionnels de Naâma considère que la wilaya dispose de tous les atouts touristiques : quatre lacs classés Ramsar, ainsi que des réserves naturelles à Magrar, Tiout, Aglat Daïra et Ain Zerga.

Le relief montagneux de l’Atlas saharien enrichit encore l’offre touristique, notamment le parc national du mont Issa à Ain Zerga, classé par la loi 83/03 sur la protection de l’environnement et le décret 03/148 sur la classification des parcs et réserves, représentant un exemple naturel exceptionnel avec une biodiversité animale et végétale riche, formant un pôle touristique et économique. S’ajoutent les montagnes de Chmarikh, Antar, Mergad, Makther et Amzi.

Palais anciens…

Les visiteurs peuvent explorer les palais anciens des communes de Naâma, témoins de l’histoire et de la richesse de la région, surtout dans le sud : Ain Zerga, Safisifa, Asla, Tiout et Magrar. Naâma bénéficie également d’un tourisme thermal, avec le bain thermal d’Ain Zerga à Asla, au pied du mont Chmarikh. Ses eaux thermales atteignent 45 °C et peuvent accueillir 250 personnes par jour, avec des maisons pour la jeunesse, des bungalows et des hébergements touristiques.

Zaouias et patrimoine religieux

L’autre visage de Naâma se retrouve dans ses monuments religieux, avec zaouias, anciennes mosquées et tombeaux de saints, mettant en valeur les saisons et rituels, notamment la célébration de Sidi Ahmed El Magdoub à Asla en octobre, attirant un grand nombre de visiteurs et touristes.

Le directeur du tourisme note que le tourisme religieux devient une destination clé, avec des itinéraires touristiques dédiés pour faciliter l’accès aux zaouias et mosquées dans les palais anciens.

Festival afro-arabe…

Les perspectives indiquent un essor touristique à Naâma dans les prochaines années, suite à la promotion de la région à travers le camp afro-arabe de Tiout à la fin du mois et l’organisation des Jeux olympiques du désert. Les autorités locales et le service du tourisme pourraient également valoriser Cheikh Bouamama pour accueillir des festivals et rencontres mettant en lumière la région, qui a attiré plusieurs personnalités internationales, dont l’écrivaine suisse Elisabeth Eberhardt, à l’image de ce que la wilaya de Batna a fait avec le festival de Timgad et Sétif avec le festival de Djemila.

Parallèlement, la capacité hôtelière est en cours d’extension : alors que Naâma ne comptait qu’un seul hôtel auparavant, le nombre est maintenant de neuf, et douze autres hôtels sont en construction. Le wali souligne que les procédures ont été simplifiées et les hôtels de Djebel Makther et Cheikh Bouamama à Ain Zerga rénovés, pour répondre aux besoins des visiteurs durant la saison touristique.

Six zones d’expansion touristique, totalisant 3 113 hectares, ont été approuvées pour les porteurs de projets d’investissement, et seront bientôt disponibles sur la plateforme numérique d’investissement, situées à Ain Warka, Ain Sefra et Djnin Bourezk, Asla, Tiout et Safisifa.

Sur le territoire de Naâma, tout mérite la vie : ses atouts naturels – terres fertiles, nappes phréatiques, climat favorable, diversité du relief – en font un musée naturel magnifique, avec ses lacs, montagnes, palais, roches gravées et sites religieux historiques, ce qui lui confère un potentiel économique et touristique unique, rompant avec l’image traditionnelle de Naâma, autrefois cantonnée à l’élevage, pour devenir une région dynamique et tournée vers l’avenir.

Envoyé spécial d’« El Khabar » à Naâma : Nouar Souko