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« L’Algérie gère le dossier de la migration sans politisation ni chantage »

La cheffe de mission de l’Organisation internationale pour les migrations, Lalini Veerassamy, dans El Khabar

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Dans un entretien approfondi accordé à El Khabar, Mme Lalini Veerassamy, cheffe de mission de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) en Algérie, présente la vision de l’organisation et ses priorités stratégiques dans un pays occupant une position géostratégique unique dans le dossier migratoire. Avec l’afflux de milliers de migrants en provenance d’Afrique de l’Ouest et du Sahel, l’Algérie s’impose à la fois comme pays de transit et de destination, ce qui la place au cœur de l’un des dossiers les plus complexes et les plus politisés au niveau mondial.

À travers cet entretien, Mme Veerassamy met en lumière un partenariat en pleine expansion avec les autorités algériennes, centré sur le programme de retour volontaire et de réintégration en tant qu’option humanitaire pionnière. Elle évoque également une coopération élargie dans les domaines de la migration de travail, de la santé et de l’identité juridique. L’entretien révèle un modèle de coopération singulier dans lequel l’Algérie, avec l’appui de la communauté internationale, cherche à transformer le défi démographique en opportunités de stabilité régionale, tout en rejetant clairement toute instrumentalisation ou exploitation politique de la question migratoire.

Pouvez-vous nous expliquer les priorités stratégiques de votre organisation en Algérie, la manière dont elles s’alignent sur les besoins nationaux, ainsi que leur cohérence avec les principes et objectifs énoncés dans le Pacte mondial pour les migrations ?

Tout d’abord, permettez-moi de vous remercier pour votre présence aujourd’hui auprès de l’Organisation internationale pour les migrations et pour l’intérêt que vous portez à la compréhension de notre mission et de nos priorités. Il s’agit d’ailleurs de notre tout premier entretien avec le journal El Khabar.

Pour revenir à votre question, l’OIM est une agence du système des Nations unies. Nous faisons partie de la famille onusienne qui soutient le gouvernement algérien. Je tiens à rappeler que l’Algérie est membre de l’OIM depuis 2002, ce qui signifie que notre partenariat s’inscrit dans la durée. Toutefois, l’OIM n’est présente physiquement en Algérie que depuis neuf ans, période durant laquelle nous avons considérablement renforcé notre coopération avec les autorités algériennes.

De manière générale, ce sont les autorités nationales – c’est-à-dire l’État membre – qui définissent les priorités. Notre rôle consiste à comprendre les défis et les opportunités auxquels le gouvernement est confronté en matière de migration, puis à élaborer, conjointement avec lui, des plans d’action et des mesures concrètes.

En Algérie, le principal défi réside dans la position géographique particulière du pays, situé entre l’autre rive de la Méditerranée (l’Europe) et la région du Sahel et de l’Afrique de l’Ouest. Cette situation confère à l’Algérie un rôle unique dans la dynamique migratoire. De nombreux migrants, en quête d’une vie meilleure pour diverses raisons, traversent le territoire algérien, faisant du pays un espace de transit.

L’Algérie est-elle uniquement un pays de transit ?
L’Algérie est à la fois un pays de transit et un pays de destination, ce que les autorités algériennes reconnaissent elles-mêmes. De nombreux migrants en situation irrégulière recherchent des opportunités de travail et de meilleures conditions de vie. Le défi majeur réside donc dans l’arrivée de flux importants de migrants, souvent déjà en situation de vulnérabilité avant même le début de leur parcours migratoire, une vulnérabilité accentuée par les risques inhérents à l’ensemble du voyage.

Dans ce contexte, l’OIM intervient sur le terrain, notamment à travers un programme très spécifique appelé programme de retour volontaire et de réintégration. Il s’agit d’un programme véritablement novateur, car il permet aux personnes en quête d’une vie meilleure de retourner dans leur pays d’origine de manière sûre, digne et surtout volontaire. Ce programme a été fortement valorisé par le gouvernement algérien dès le départ, et notre coopération à ce sujet est aujourd’hui très étendue.

L’Algérie est le deuxième pays d’Afrique du Nord en termes de nombre de retours volontaires. Les migrants viennent à nous de leur plein gré pour demander un appui au retour. En 2025 seulement, nous aurons réalisé environ 9 500 opérations de retour volontaire, un chiffre considérable à tous égards.

Comment évaluez-vous concrètement le succès de ce programme ?
Ce programme constitue une alternative digne pour les migrants, leur permettant d’éviter une situation irrégulière prolongée dans un pays. Il est mis en œuvre non seulement par l’OIM, mais en étroite collaboration avec les autorités locales, notamment la Direction générale de la sûreté nationale et la Gendarmerie nationale. Cette coordination renforce la confiance des migrants, qui se sentent en sécurité pour solliciter l’aide de l’OIM, ce qui explique le succès fondamental du programme.

Le fait que plus de 12 000 personnes se soient présentées cette année pour demander un retour volontaire est en soi un indicateur de réussite. Ces personnes, malgré leur vulnérabilité, ont confiance dans le dispositif et savent qu’elles pourront rentrer chez elles avec un soutien adapté. Il est important de rappeler qu’il s’agit d’êtres humains en quête d’une vie meilleure, et non de criminels.

Lorsque nous les accompagnons vers leurs pays d’origine – qu’il s’agisse de la Guinée, du Mali, du Burkina Faso ou d’autres pays – les équipes de l’OIM sont présentes sur place pour évaluer leurs besoins, proposer un accompagnement, et soutenir leur réintégration. Le soutien commence d’ailleurs dès l’Algérie, avec des formations, un appui psychosocial et une préparation au retour.

Le passage, en l’espace de trois ans, d’environ 500 retours volontaires à 9 500 aujourd’hui, illustre clairement la réussite de cette coopération. En 2025, l’OIM en Algérie a aidé plus de 9 500 migrants à reconstruire leur vie dans leur pays d’origine.

Quelles sont les principales nationalités concernées ?
Les migrants arrivant en Algérie proviennent principalement d’Afrique de l’Ouest, notamment du Mali, du Burkina Faso, de la Guinée-Conakry, du Bénin et du Nigeria. Des flux plus modestes sont également observés en provenance du Sénégal, de la Gambie, de la Côte d’Ivoire, du Bangladesh et de la Somalie. L’Algérie est devenue, avec la Libye et la Tunisie, un corridor de transit majeur pour de nombreuses nationalités.

Il est important de replacer les chiffres dans un contexte global : alors que près de 9,8 milliards de déplacements aériens sont attendus cette année dans le monde, on dénombre environ 281 millions de migrants internationaux, dont 60 % sont des travailleurs migrants. Certains pays, en raison de leur position géographique, supportent une charge plus importante dans la gestion de ces flux.

Quels sont les principaux défis liés à la protection des droits des migrants ?

En ce qui concerne l’Algérie, la majorité des migrants relèvent de plusieurs catégories, mais il s’agit principalement de jeunes hommes qui souhaitent tenter l’aventure et venir travailler. Les problématiques sont donc souvent liées au droit du travail ou à l’accès aux soins de santé.

Il y a également des femmes et des enfants. Bien souvent, même si la femme n’est pas vulnérable en soi — et j’en suis convaincue — le fait de migrer seule la rend vulnérable en raison des personnes qu’elle peut rencontrer ou des conditions dans lesquelles elle se retrouve. On trouve ainsi des femmes et des enfants accompagnant leurs familles, mais aussi des enfants non accompagnés.

Ces groupes constituent, par nature, des catégories vulnérables, et le parcours migratoire lui-même accentue cette vulnérabilité. Le principal problème concerne la santé, qu’il s’agisse d’accidents, de problèmes médicaux ou de maladies transmissibles. C’est une question que nous traitons en étroite collaboration avec les autorités.

Par ailleurs, nous signerons prochainement une convention avec le ministère de la Santé afin de renforcer notre action dans ce domaine, ce qui est tout à fait remarquable si l’on compare avec de nombreux pays dans le monde. En règle générale, les personnes en situation irrégulière n’ont pas accès aux soins de santé ou doivent en assumer elles-mêmes les coûts. Ici, en revanche, un réel effort est déployé pour comprendre la situation de ces personnes dépourvues de ressources financières et y répondre, tout en prenant en charge la question de la santé publique dans son ensemble, notamment en ce qui concerne les maladies transmissibles.

Ainsi, plusieurs dimensions sont concernées : la santé, la protection des femmes et des enfants, et la question du travail.

Comment évaluez-vous la coopération entre l’Algérie et l’OIM ?

La coopération est excellente ; elle s’est développée très rapidement au cours des neuf dernières années. Nous disposons d’un bureau en Algérie depuis 2017, ce qui fait que cette coopération est relativement récente, mais elle a connu une croissance rapide, car nous avons su démontrer concrètement la valeur ajoutée et l’avantage comparatif de l’Organisation internationale pour les migrations pour les autorités algériennes. Nous proposons de véritables alternatives et agissons comme partenaire opérationnel sur le terrain, afin de rendre tangible l’impact de notre action. La coopération est donc excellente et en constante progression.

Il y a toujours davantage à faire dans le domaine de la migration : c’est une question complexe et transversale, qui touche à de nombreux secteurs, qu’il s’agisse des enfants, de la santé ou de l’emploi. Cela nécessite de rassembler encore plus de partenaires. Néanmoins, la coopération est très solide et en plein essor. Cette année, nous avons également diversifié nos activités, et je pense que l’année prochaine verra l’élargissement de notre action à de nouveaux domaines, notamment dans le champ du travail, entre autres.

J’ai rencontré le ministre du Travail et de l’Emploi il y a quelques jours, et nous avons abordé la question de la migration de la main-d’œuvre et de l’organisation de la demande de travail. Cette question a également été évoquée par le président Abdelmadjid Tebboune dans son allocution à Béchar cette année, soulignant l’importance de mieux organiser cette migration et cette dynamique économique. Ainsi, cette coopération continue de se développer, et nous disposons réellement d’une opportunité solide de collaboration avec les autorités algériennes.

Il existe des crimes de traite des êtres humains et de trafic de migrants, des réalités très préoccupantes. Quelles sont les mesures conjointes actuellement mises en œuvre, par exemple, pour démanteler les réseaux et protéger les victimes ?

Il s’agit d’un phénomène mondial. Tout d’abord, remettons-le dans son contexte : c’est un commerce qui génère des sommes d’argent colossales. Il s’agit d’une criminalité organisée à très forte rentabilité, qui est en expansion, car il faut savoir que plus les frontières se ferment, plus ce commerce se développe.

Nous l’avons constaté durant la pandémie de Covid-19, et nous l’avons observé à de nombreuses reprises dans l’histoire : la fermeture des frontières entraîne l’expansion et la croissance de ces activités. Il est important de distinguer le trafic et la traite.
Le trafic (trafic), appelé en anglais smuggling, correspond à une situation dans laquelle une personne sollicite l’aide d’un passeur ou d’un intermédiaire pour faciliter son déplacement d’un point A à un point B, ou d’un pays A vers un pays B.
La traite (traite), en revanche, est définie juridiquement au niveau international, notamment par le Protocole de Palerme, qui repose sur le principe selon lequel les personnes déplacées dans le cadre de la traite sont considérées comme des victimes. Il s’agit de personnes qui ont été recrutées, déplacées ou influencées pour se rendre dans un autre pays à des fins d’exploitation. Souvent, cette réalité n’est révélée qu’au moment où elles sont interrogées par la police ou les forces de sécurité. C’est alors que l’on comprend qu’elles ont été trompées durant leur parcours et qu’elles sont des victimes nécessitant une protection spécifique.

À ce titre, de véritables efforts sont déployés, non seulement par l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) en collaboration avec les autorités algériennes, mais également par d’autres agences des Nations unies. Tout d’abord, une loi relative à la traite et au trafic a été adoptée en 2023, ce qui constitue une avancée majeure. Le défi réside désormais dans la mise en œuvre effective de cette loi.

Dans ce cadre, des organisations comme la nôtre s’emploient à accompagner les autorités, tant au niveau des forces de sécurité — pour l’identification, l’enquête, les entretiens et la protection — qu’au niveau des dispositifs sociaux de protection et des possibilités de retour volontaire. Nous revenons une fois de plus à la question du retour volontaire, qui permet également de soutenir les victimes potentielles de la traite, où qu’elles se trouvent, afin de leur offrir un retour digne et une prise en charge réelle de leurs besoins. Il s’agit de personnes qui ont indéniablement subi des traumatismes et qui ont besoin d’un accompagnement adapté.

C’est aujourd’hui l’un des domaines dans lesquels nous travaillons le plus étroitement avec le ministère de la Solidarité nationale. Nous avons également organisé récemment, il y a une semaine, des sessions de formation à destination de policières, de gendarmes femmes ainsi que d’assistantes sociales, afin de mieux comprendre les traumatismes auxquels ces victimes potentielles peuvent être confrontées, et de renforcer le lien de confiance entre les forces de sécurité et les victimes potentielles. L’objectif est que ces femmes puissent partager ce qu’elles ont vécu en toute sécurité, et que l’action des forces de sécurité, à ce moment précis, soit à même d’enquêter et de traiter efficacement cette problématique.

Il s’agit d’un phénomène transfrontalier, qui ne se limite pas à l’Algérie. Il commence dès le pays d’origine et se poursuit jusqu’au pays de destination, constituant un réseau complet. Cela nécessite donc l’accès à des preuves et à des témoignages afin de permettre aux forces de l’ordre de mener leur travail d’enquête. Le simple fait de disposer d’une loi adoptée en 2023 représente déjà une réalisation majeure en soi ; l’enjeu actuel est désormais son application concrète.

Existe-t-il des mesures conjointes à l’horizon pour renforcer la coopération entre l’Organisation internationale pour les migrations et l’Algérie ?

Oui, je pense que le retour volontaire restera le projet phare, et qu’il convient de continuer à s’y concentrer, car il offre une alternative réelle aux migrants qui vivent des situations difficiles en Algérie et à travers tout le pays. Il ne s’agit pas uniquement de l’Algérie dans son ensemble : c’est un programme global, sachant que 23 % de nos opérations sont menées à Tamanrasset.

En ce qui concerne la migration irrégulière, que peut-on traiter au niveau des politiques nationales ?

C’est précisément ce que nous souhaitons aborder à partir de l’année prochaine, en commençant par la migration de travail. Il s’agira de permettre à deux pays de discuter de leurs besoins en main-d’œuvre et de structurer les agences publiques de l’emploi afin d’organiser ces flux de travailleurs, de sélectionner les personnes, de les former et de les orienter vers des institutions publiques ou privées, que ce soit dans les secteurs du bâtiment ou de l’agriculture, où les besoins existent.

Je pense que ce sera un domaine clé, aux côtés de la question de la santé. Je réfléchis tout particulièrement à la migration de travail et à la santé pour l’année prochaine, ainsi qu’à la question de l’identité juridique. Très souvent, ces personnes arrivent sans documents, les perdent en cours de route, ou des enfants naissent sur le territoire. Cela exige un véritable travail sur l’importance de l’identité et de la reconnaissance juridique, en collaboration non seulement avec les autorités algériennes, mais également avec les ambassades.

L’ensemble de ce travail sera structuré l’année prochaine. Toutefois, je pense que l’essentiel reste la poursuite et le renforcement des efforts en matière de retour volontaire, car la demande est très forte. Plus nous consolidons ce dispositif, plus cela permettra de diversifier et de renforcer l’appui de l’OIM aux politiques nationales.

Je tiens à souligner que le gouvernement algérien coopère de manière beaucoup plus étroite — et le fera de façon officielle — avec le Pacte mondial pour les migrations, et souhaite devenir un acteur de référence dans ce domaine, à l’instar d’une quarantaine d’autres pays qui se sont positionnés comme leaders sur cette question. Je pense donc que nous verrons beaucoup plus d’initiatives l’année prochaine… du moins, nous l’espérons.

Oui, j’en suis convaincue. Les défis liés aux mouvements de population sont en augmentation, tout comme la nécessité de renforcer tout ce qui concerne la réintégration et le retour.

Vous évoquez la réintégration, comment se met-elle en œuvre ?

Nous y travaillons dans le cadre de cette coopération internationale, en coordination avec l’Agence algérienne de coopération internationale. Nous collaborons avec cette agence pour renforcer la réintégration, notamment lorsqu’il existe déjà des domaines de coopération, comme la création de centres de formation ou d’autres structures éducatives dans certains pays, notamment dans le Sahel ou ailleurs. Nous pouvons alors nous inscrire dans ce type de coopération, qui devient en quelque sorte tripartite, afin de renforcer la réintégration des personnes et la stabilité des communautés.

L’objectif premier est la stabilité des populations, afin que des opportunités existent dans leurs pays d’origine et qu’elles ne soient pas poussées à emprunter des routes dangereuses, sans préparation, au péril de leur vie.

Compte tenu des éloges adressés aux efforts conjoints de l’Algérie et de l’OIM dans la gestion des questions migratoires, et de la description de la position géographique de l’Algérie comme étant « très particulière », comment l’Algérie peut-elle tirer parti de cette position pour transformer les défis liés à la migration en opportunités favorisant la stabilité régionale et proposant des solutions modèles applicables à l’échelle internationale, dans un contexte où la question est « extrêmement complexe et fortement politisée » au niveau mondial ?

Je pense que la célébration de la Journée internationale des migrants, le 18 décembre, est une occasion de mettre en lumière l’ensemble des efforts engagés par le gouvernement algérien depuis plusieurs années, et qui sont renforcés avec le soutien de l’Organisation internationale pour les migrations. Il s’agit d’une question mondiale, extrêmement complexe et fortement politisée, comme nous le savons tous.

Je pense qu’un réel effort est déployé pour préserver la stabilité et la cohésion existantes, que l’on ne retrouve peut-être plus dans d’autres pays, face à un sujet devenu aujourd’hui très politisé à l’échelle mondiale. En cette Journée internationale des droits de l’homme, nous rappelons que les droits des migrants sont universels : toute personne, quelle que soit son origine, mérite protection, dignité et respect.

C’est ce message que je souhaite mettre en avant : il existe des efforts positifs et une volonté de les soutenir, qu’il s’agisse d’appuyer les communautés dans leurs pays d’origine, de mieux comprendre les besoins du pays d’accueil, ou encore de coopérer avec les pays européens pour gérer les flux migratoires vers l’Europe.

La relation de l’Algérie avec la question migratoire est donc très particulière, compte tenu de sa position géographique singulière. Le pays s’efforce de trouver des solutions plus durables et plus pérennes, en définitive pour des personnes — des êtres humains — qui aspirent à une vie meilleure, une aspiration qui ne date pas d’aujourd’hui.

Dispositifs et actions de terrain
Dans la région de Kharouba, à Alger, le centre dédié apporte un soutien quotidien à des centaines de migrants et leur offre la possibilité de retourner dans leurs pays d’origine dans la dignité et le respect. Chaque situation est traitée avec soin, empathie et professionnalisme.

À travers le programme d’assistance au retour volontaire et à la réintégration, l’OIM en Algérie propose des options sûres et dignes à ceux qui souhaitent rentrer dans leur pays d’origine, garantissant un parcours humain et sécurisé. Tous les services de l’OIM sont entièrement gratuits.

Dans le cadre du Projet Migration et Développement en Afrique du Nord (NAMAD), l’OIM intervient en Algérie, en Égypte et en Tunisie sur l’un des itinéraires migratoires les plus complexes au monde, en fournissant une assistance humanitaire vitale et un accompagnement psychosocial aux migrants en situation de vulnérabilité.

En Algérie, l’OIM met en œuvre des activités psychosociales, notamment la musique et le sport, afin de réduire le stress, restaurer la confiance en soi et aider les personnes à se préparer à un retour volontaire et sécurisé. Cette expérience démontre qu’un soutien adapté permet aux individus de retrouver stabilité et dignité au sein de leurs communautés.

L’OIM affirme qu’une migration bien gérée, respectueuse de la dignité humaine, est bénéfique tant pour les migrants que pour les sociétés.

Mécanismes de gestion du retour volontaire en Algérie
Il existe le Dispositif d’Accueil pour le Retour Volontaire (DARV), géré par l’OIM en Algérie et situé à Dar El Beïda, à Alger. Ce centre fournit une assistance aux migrants vulnérables à travers des services de soutien psychosocial, de réintégration et organise leur retour volontaire vers les pays d’origine. Un second centre est également implanté à Kharouba.

Dans le cadre du retour volontaire, les étapes sont les suivantes : toute personne en situation irrégulière en Algérie se présente volontairement au centre d’enregistrement de Kharouba, où une équipe de l’OIM l’accueille.

Environ soixante personnes y sont enregistrées chaque jour. Une équipe de sept à huit agents est présente, accompagnée d’un personnel médical, car les migrants présentent souvent des besoins sanitaires urgents. Une fois l’enregistrement effectué, les procédures de retour volontaire sont engagées avec les ambassades concernées, incluant l’identification et la préparation des documents de voyage.

Après l’identification, les migrants sont hébergés dans un second centre, le DARV de Dar El Beïda, pouvant accueillir jusqu’à 280 personnes, dans un hôtel transformé en centre d’accueil, en coopération avec la wilaya d’Alger et le ministère de l’Intérieur. Le centre est géré par l’OIM, en collaboration avec un prestataire travaillant étroitement avec les autorités.

Un troisième centre est dédié aux personnes les plus vulnérables, notamment les femmes, les enfants et les cas médicaux, dont l’emplacement ne peut être divulgué. Un quatrième centre médical est consacré à l’évaluation de l’état de santé.

Comme indiqué précédemment, 23 % des opérations de retour sont réalisées depuis Tamanrasset. Des équipes mobiles y organisent des vols affrétés et assurent l’ensemble des procédures sur place, afin d’éviter aux migrants de longs déplacements vers Alger. L’OIM se rend directement auprès des migrants et leur permet de s’inscrire localement.

Des infrastructures mises à disposition par la wilaya de Tamanrasset permettent de reproduire l’ensemble du dispositif, en coordination avec les services de santé. Des opérations similaires ont également été menées à Tébessa et dans d’autres régions, dans une logique de décentralisation, lorsque cela est nécessaire.

Les opérations à Tamanrasset se font-elles par vols affrétés ?

Oui. Nous organisons des vols dédiés au retour volontaire. Je ne dispose pas du nombre exact de vols affrétés, mais nous avons effectué un nombre significatif de rotations spécialement affrétées pour ces opérations.

Faites-vous appel à Air Algérie ?

Oui, il s’agit principalement d’Air Algérie. Lorsque la compagnie nationale n’est pas en mesure d’assurer ces vols, nous faisons appel à d’autres compagnies affrétées via le siège de l’OIM, exclusivement pour les opérations de retour volontaire.

Qui prend en charge les coûts de ces opérations ?

Les coûts sont pris en charge par l’OIM, grâce à des financements provenant de bailleurs tels que l’Union européenne, le Danemark, la Norvège, les Pays-Bas et l’Italie, ainsi que d’autres pays européens partenaires des Nations unies.

Je tiens à souligner que cette approche est fortement encouragée par les autorités algériennes. Lorsqu’un dialogue bilatéral est engagé et que la migration figure parmi les priorités, la position du gouvernement algérien est claire : financez l’OIM. L’Algérie n’a pas besoin de financement direct ; elle assure la gestion et considère l’OIM comme un partenaire de soutien. Les fonds ne sont donc pas versés à l’Algérie, ce qui constitue une approche très différente de celle d’autres pays qui souhaitent gérer directement ces financements. L’Algérie n’utilise pas la migration comme un outil.

L’Algérie ne souhaite pas politiser cette question ; elle entend la gérer en coopération avec l’Union européenne et les pays africains. Elle ne l’exploite pas comme un moyen de pression et refuse toute logique de chantage. Elle cherche avant tout à trouver des solutions durables, ce qui est, à mon sens, fondamental.

Nous le disons clairement, et nos partenaires européens le confirment : l’approche de l’Algérie est très différente. Certains pays utilisent la migration comme un instrument de chantage — je ne citerai pas de noms — mais cela est bien connu.

Nos équipes sont présentes sur le terrain, et c’est là que les autorités algériennes perçoivent concrètement l’intérêt de collaborer avec une agence disposant non seulement de ressources financières et d’un soutien politique, mais surtout de capacités opérationnelles réelles. La migration représente une charge supplémentaire pour le système éducatif et pour de nombreux services publics, et nous intervenons pour contribuer à atténuer cette pression supplémentaire. C’est une réalité.