Culture

Un théâtre vivant qui met les maux à nu

« Les Fugitives », une œuvre marquante du Théâtre national tunisien

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Présentée hier soir dans le cadre de la 18ᵉ édition du Festival national du théâtre professionnel, la pièce « Les Fugitives » du Théâtre de Tunisie a marqué les esprits. Accueilli par un public nombreux, dépassant la capacité du Théâtre national, le spectacle a su capter l’attention dès ses premières minutes.

En présence de la ministre de la Culture et des Arts, Malika Bendouda, la représentation a suscité une forte interaction avec le public, qui a longuement applaudi à l’issue du spectacle. Cette réception enthousiaste témoigne d’un niveau artistique remarquable, tant sur le plan de l’interprétation que de la mise en scène et du langage théâtral.

Loin de rechercher la complaisance, « Les Fugitives » s’inscrit dans une démarche qui dérange et interroge. Le spectacle ne cherche pas à rassurer le spectateur, mais à ébranler ses certitudes et à l’immerger dans un état de tension permanente. Il ne propose ni réponses ni solutions, préférant exposer une réalité brute, placée face à un miroir incisif.

Sur une scène presque dépouillée, les corps deviennent le principal vecteur de sens. Le mouvement, le silence et la gestuelle prennent le pas sur la parole, rare mais chargée. La lumière suggère plus qu’elle n’éclaire, accompagnant une dramaturgie où le non-dit occupe une place centrale.

Les personnages, volontairement anonymes, oscillent entre l’individuel et le collectif. Ils incarnent une humanité en fuite, tiraillée entre le désir de salut et la crainte de l’aboutissement. De quoi fuit-on ? Vers quoi se dirige-t-on ? Autant de questions que le spectacle laisse ouvertes, invitant le spectateur à une participation active dans la construction du sens.

À la fois exigeant et provocateur, « Les Fugitives » s’impose comme une œuvre qui assume le risque du débat. En plaçant le public au cœur de l’expérience, il ravive la réflexion sur l’état du théâtre dans la région, notamment en Algérie, où la question de son renouveau est régulièrement posée. Ce spectacle rappelle avec force que lorsque le théâtre est vivant, il révèle les fractures, met à nu les faiblesses et ouvre des perspectives.